Vue du lac d'Albano

Né à Chantilly en 1755, Nicolas-Didier Boguet meurt à l’âge de 84 ans à Rome où il est installé depuis 1783. Formé dans le milieu académique parisien, il connaît une belle renommée comme peintre de batailles mais ses vues de nature en font l’un des principaux représentants français de la tradition du paysage italianisant au XVIIIe siècle. D’inspiration classique, ce genre reprend les modèles élaborés à Rome par Claude Lorrain et Nicolas Poussin un siècle plus tôt. Boguet partage avec ses illustres prédécesseurs le goût pour une expression idéalisée, régie par l’harmonie et la beauté. Contrairement à eux, il s’inspire cependant le plus souvent de sites réels, comme dans cette œuvre qui représente le lac d’Albano, lac volcanique situé à une vingtaine de kilomètres au sud-est de Rome, le long de la via Appia. Boguet avait élu domicile à sa proximité et en fut inspiré par trois fois, peignant deux autres vues du lac. Stendhal lui-même vint lui rendre visite, évoquant le peintre comme « un élève de Claude Lorrain, et le meilleur ». La composition, parfaitement équilibrée, comporte un premier plan aux couleurs automnales largement dégagé et une ligne d’horizon placée bas. À gauche et à droite, une colline surmontée d’une « fabrique » et un groupe d’arbres encadrent l’espace. La perspective plongeante oriente le regard sur le lac noyé dans une brume matinale aux tons froids de bleus et de mauves. Dans ce panorama grandiose et sous une lumière fine et cristalline, lavandières, troupeaux et bergers s’animent sur le chemin, apportant la note pastorale indispensable à cette évocation bucolique. L’aspect menaçant de l’arbre penché altère légèrement cette sérénité et constitue un motif pittoresque. Une facture souple et une matière légère caractérisent ce tableau d’une grande perfection technique, chef-d’œuvre de la peinture de paysage néoclassique.