Présentation de la Vierge au Temple
Szilvia Bodnár (2007) ainsi qu’Emmanuelle
Brugerolles et David Guillet[1] ont fait tout
récemment le point sur les dessins de cet
artiste, originaire d’Ingolstadt en Bavière, et
rendu à cette feuille sa juste attribution.
Toute la carrière de Freisinger se déroule dans
cette ville prospère. Il est curieux de constater
que bien qu’il soit l’un des plus importants
artistes bavarois, il n’a jamais été amené à travailler
pour la cour du duc de Bavière à Munich.
L’art de la capitale est dominé à l’époque par
le Flamand Peter Candid (vers 1548-1628),
peintre du duc Guillaume V depuis 1586.
Freisinger a probablement voyagé en Italie,
même si nous ne pouvons l’affirmer avec
certitude : le style de ses dessins montre qu’il
connaît bien l’art italien de son époque. L’artiste
semble marqué par les oeuvres des frères
Zuccari, par le Parmesan ou encore par Cesare
Nebbia. Il se souvient aussi, dans ses arrière-plans,
des expériences de l’école du Danube
et révèle, par ailleurs, une certaine familiarité
avec l’art de l’école de Prague, notamment de
Bartholomeus Spranger dont les élèves travaillent
beaucoup en Allemagne du Sud.
En 1583, Freisinger devient citoyen d’Ingolstadt
et présente son chef-d’oeuvre à la maîtrise.
Il travaille beaucoup pour les églises de la ville,
notamment pour les Jésuites qui y tiennent
un important collège. Véritable centre de la
Contre-Réforme au sud de l’Allemagne, cette
école prestigieuse forme les élites du pays et
aura comme élève le futur duc de Bavière, le
redoutable et futur électeur Maximilien Ier.
Environ soixante-dix dessins et cinq gravures de cet artiste sont aujourd’hui connus. La
feuille de Grenoble figure parmi les plus intéressantes,
exécutée à la plume et rehaussée de
blanc, ce qui lui confère un aspect très pictural.
L’élégance des formes est remarquable, la mise
en page magistrale. Le monogramme et la date
suggèrent que l’oeuvre est destinée à la vente.
La Présentation de la Vierge au temple fait peut-être
partie d’une série dédiée à l’histoire de la
Vierge [2]. Il existe un dessin aujourd’hui conservé
à la Kunsthalle de Brême, le Christ faisant ses
adieux à sa mère, réalisé dans la même technique,
de mêmes dimensions, qui a été également
exécuté en décembre 1592[3]. À juste titre,
Bodnár en conclut que les dessins de Grenoble
et de Brême font partie de la même commande.
Une copie de cette feuille, avec des variantes,
est conservée à la Staatsgalerie de Stuttgart[4],
tandis qu’un autre dessin, très proche de celui
de Grenoble, est apparu en janvier 2013 sur le
marché de l’art parisien. Il porte la
marque de collection de Bernhard Funck, à
Munich, et mesure 24,5 cm sur 19. Il est plus
large que la feuille grenobloise et laisse penser
que cette dernière a été coupée sur la droite.
Les deux dessins, conservés à Stuttgart et sur
le marché de l’art parisien, sont peut-être de
la même main : leur conception est plus graphique
et la technique rappelle davantage l’art
de Dürer et de son école.
[1] Voir cat. exp. Paris, 2012-2013.
[2] Le 10 décembre, date inscrite sur la feuille, correspond à la fête de Notre-Dame-de-Lorette.
[3] Cat. exp. Brême, 1998, p. 78, inv. no 60/195.
[4] Kaulbach, 2007, no 178 repr.
Découvrez également...
-
Bouquet champêtre
1956 -
Enfant tenant un panier
vers XVIIIe siècle -
Plastikcity
2006