Trois jeunes garçons - Etude pour un mariage de la Vierge
L’attribution ancienne à Bernardino Poccetti,
attestée par l’inscription à la plume lisible au bas
de la feuille, situait, à juste titre, son exécution
à Florence dans le dernier tiers du XVIe siècle.
Malgré le fait que Poccetti eut parfois recours à
la technique des larges traits parallèles, très
présente dans la feuille de Grenoble, il n’est plus
possible aujourd’hui de retenir cette attribution.
Catherine Monbeig Goguel propose d’y reconnaître
la main du peintre florentin actif au
Studiolo du grand duc Francesco I, Maso da San
Friano, mort prématurément en 1571. Effectivement,
la feuille de Grenoble présente de
nombreuses similitudes avec les dessins certains
de l’artiste, notamment cette façon d’indiquer
les yeux par un simple coup de crayon (ou de
plume), d’esquisser rapidement les pieds et les
mains et ce recours systématique aux traits
parallèles. On retrouve ces caractéristiques du
style graphique de l’artiste tout au long de sa
carrière, dès ses premiers dessins documentés,
telle la Pietà de la collection du duc de Devonshire
à Chatsworth (no 1084), jusque dans ses
feuilles réalisées à la fin de sa carrière, comme
par exemple dans le Christ ressuscité du
Gabinetto Disegni e Stampe degli Uffizi de
Florence (no 7283 F). Toutefois, la légèreté du
coup de crayon qui distingue le dessin de
Grenoble est plutôt en contraste avec le style
davantage compact des feuilles certaines de
l’artiste, ce qui ne nous permet pas d’être
catégorique quant à son attribution à Maso. La
mode vestimentaire portée par les modèles,
vêtus de chemises au large col rabattu, apparaît
à Florence à partir du début des années 1570, et
situerait néanmoins l’exécution de la feuille
juste avant la mort de l’artiste.
La feuille est sans aucun doute préparatoire à
un Mariage de la Vierge, ainsi que l’indique la
position des trois jeunes hommes. Selon une
habitude largement répandue à Florence depuis
le XVe siècle, l’auteur du dessin a fait poser ses
jeunes assistants de l’atelier, appelés garzoni, en
situation. Cette pratique était déjà répandue
dans les ateliers de Sandro Botticelli, de Filippino
Lippi et de Pietro Perugino. Raphaël y eut
systématiquement recours, comme l’atteste le
dessin préparatoire pour l’ensemble de la
composition du retable de San Niccolo da
Tolentino esquissé vers 1500, conservé au Palais
des Beaux-Arts de Lille (inv. PL.474 recto), ainsi
que la feuille préparatoire à la figure de la Vierge
de la Madone d’Albe, également conservée à Lille
(inv. PL.457 verso), où les garzoni posent en
tenue d’atelier. Tout au long du XVIe siècle, à
Florence, grâce aux dessins qui nous sont
parvenus, on découvre la vie des ateliers, où les
garzoni se reposent, jouent, posent nus ou en
tenue d’atelier et miment, comme dans la
répétition d’une représentation théâtrale, les
scènes du Nouveau Testament. C’est vraisemblablement
le large corpus des dessins de
Pontormo qui illustre le mieux cette pratique,
l’artiste allant jusqu’à poser lui-même juste vêtu
d’un caleçon devant un miroir (Londres, British
Museum, inv. 1936-10-10-10). Sur une même
feuille, Pontormo reportait parfois les adolescents
à la fois nus et vêtus de la tenue d’atelier
dans la pose qu’il voulait obtenir pour les figures
de ses compositions, comme cela est visible dans
le dessin de Florence (Gabinetto Disegni e
Stampe degli Uffizi, no 447 F recto), préparatoire
à l’une des figures de la Mise en Croix du
cloître de la Certosa de Galluzzo.
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