Communion de sainte Marie Madeleine

La manière de dessiner de Camillo Procaccini,
un peu lourde et prudente, son habitude, très
évidente ici, de balayer le papier de manière
assez uniforme, à l’aide de la pierre naturelle (la
sanguine dans le cas présent), peu appuyée, sa
prédilection pour des compositions à sujet
religieux bien mesurées et des figures robustes,
empreintes d’un pathétisme religieux retenu,
sont bien les traits dominants de cette étude,
rendue à l’artiste lombard par N. Schwed
(communication orale).
L’attribution ancienne à Girolamo Muziano
(1532-1592) n’est pas absurde, puisque ces deux
artistes appartiennent au même courant de la
peinture religieuse militante de la fin du
XVIe siècle. Muziano a peint à de nombreuses
reprises le thème de saint François en extase,
immergé dans la nature, dans des termes repris
ici par Procaccini pour la Madeleine. Cependant
l’indication un peu vide du paysage est peu
compatible avec l’expression graphique de
Muziano, excellent paysagiste. De plus, Muziano,
d’une génération précédente, n’a jamais dessiné
de cette manière et la confusion avec Camillo
Procaccini résulte d’une perception superficielle
d’une image récurrente de la Contre-Réforme.
On note, à titre d’exemple, que la figure de Marie
Madeleine est conçue comme celle du bienheureux
Pie V, dans le tableau d’autel peint par
Camillo Procaccini pour l’église San Domenico
de Crémone, en 1606, Vierge avec l’Enfant adorée
par saint Dominique et le bienheureux Pie V (Isola
Dovarese, église paroissiale).
Malgré son manque de spontanéité et l’absence
d’une vibration des lignes qui caractérisent
habituellement les dessins de Camillo, il n’y a
sans doute pas lieu de contester l’originalité de
cette étude finie, ne serait-ce qu’en raison de la
mise aux carreaux, qui correspond à une
méthode de travail habituelle à l’artiste. On la
retrouve sur deux autres dessins,
également à la sanguine : MG D 1987
et MG D 508
. On ne
rencontre cependant pas le sujet de la Madeleine
pénitente dans ses œuvres peintes ou dessinées,
bien étudiées par N. W. Neilson, et, plus récemment,
à l’occasion de l’exposition de Rancate[1],
alors que celui de la Stigmatisation de saint
François a donné lieu à une large diffusion, grâce
à la gravure par Giusto Sadeler (Anvers, 1583 –
Venise, 1620). De nombreux articles ont également
été consacrés à ce dessinateur, dont
beaucoup d’exemples nous sont parvenus. Le
noyau le plus important se trouve à Milan
(Biblioteca Ambrosiana, Castello Sforzesco,
Arcivescovado, Accademia di Brera), d’où
rayonna son activité à travers la Lombardie. Les
dessins de Camillo rencontrèrent très tôt, au
tout début du XVIIe siècle, un vif succès auprès
des collectionneurs milanais, comme le
prouvent les lettres de Gerolamo Borsiere où il
est mentionné comme « maestro de’moderni
dissegnatori ». Il est difficile de dater notre
dessin, qui ne présente aucune saillie, ni
technique, ni iconographique, mais on pense
plutôt à son style des années de maturité, voire
de la fin de sa carrière, en pleine propagation du
baroque en Lombardie.
[1] Il a été établi à cette occasion que Camillo Procaccini, fils de Ercole Procaccini et frère aîné de Giulio Cesare, comme on le sait, était né en 1661 à Parme et non à Bologne.
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