Etude pour Moïse
Parmi les quatre feuilles des collections du
musée attribuées au Cavaliere d’Arpino [1], ce
dessin est le seul qui a fait l’objet d’une publication.
Bien que les deux autres feuilles
exposées fussent connues de Herwarth
Röttgen, qui confirma leur attribution à Cesari,
il ne mentionne que celle-ci dans sa monographie
consacrée à l’artiste, ne prenant de fait en
considération essentiellement que les dessins
préparatoires à une œuvre identifiée. En effet,
le dessin de Grenoble, dont la juste attribution
revient à Jacob Bean, est préparatoire à la figure
du Moïse, peinte par l’artiste sur la voûte de la
chapelle Olgiati à San Prassede de Rome
entre 1593 et 1595. Une autre étude, vraisemblablement
en rapport avec la même figure,
était alors conservée dans la collection de
Ralph Holland à Londres, mais, depuis la
parution du livre de Röttgen, est apparue une
deuxième étude préparatoire à la figure du
Moïse, acquise par l’État en 2004, grâce au
mécénat de Carrefour, et déposée au Palais des
Beaux-Arts de Lille. La figure du dessin
de Lille ne présente que quelques légères
variantes par rapport à la fresque, tandis que
dans celle de Grenoble, la position des mains,
la droite posée sur la poitrine et la gauche sur
le livre, est à l’opposé de celle adoptée par
l’artiste pour la figure peinte. L’antériorité
d’exécution du dessin de Grenoble est
confirmée par la rapidité du trait qui lui
confère un style davantage « maniériste » et
donne un sens à l’attribution traditionnelle au
peintre florentin actif au studiolo de Francesco
de Médicis, Maso da San Friano.
La solution proposée par Cesari dans la feuille
de Grenoble renvoie à ses premières réalisations,
notamment aux figures peintes dans les écoinçons
des voûtes du chœur et de la sacristie de la
chartreuse de San Martino à Naples, encore
empreintes du maniérisme tardif caractéristique
des nombreuses décorations réalisées à Rome
sous le pontificat de Sixte Quint. Giuseppe
Cesari reçut la commande de la décoration de la
chapelle Olgiati en 1587, mais son exécution ne
débuta qu’après son retour de Naples (1591) et,
en ce qui concerne la figure du Moïse, remonte
vraisemblablement à l’année 1595. L’opposition
stylistique entre le dessin de Grenoble, proche
de l’esquisse, et celui de Lille, plus soutenu, illustrent
le rôle joué par le peintre dans le passage
du maniérisme tardif au « classicisme ». C’est à
cette dualité du style du Cavaliere d’Arpino qu’il
faut attribuer le fait que ne lui fut pas octroyée
la reconnaissance par l’histoire de l’art que son
œuvre aurait méritée.
[1] MG 366, MG 913, MG D 2152 et la présente feuille.
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