Le chemin du Petit Séminaire - environs de Grenoble
Achat à M. Baratier
Dans cette grande toile majestueuse, Ernest
Hareux choisit de nous livrer une évocation très
poétique d’un paysage enneigé au crépuscule.
Les contours des montagnes du Vercors sont
peu distincts ; seule la ligne de crête se détache
sur un ciel aux couleurs délicates, d’un bleu
vaporeux poudré de nuages rosés. Dans cette
représentation de la campagne grenobloise,
il est difficile de reconnaître ce qui sera plus
tard un quartier urbain de la ville. Nous voyons
uniquement quelques bâtiments épars : une
ferme et les constructions massives du petit
séminaire du Rondeau (actuel lycée Vaucanson).
On remarque cependant des signes de l’urbanification
naissante avec la présence de réverbères
éclairés. D’autres détails pittoresques
sont distillés comme les choux du potager, les
arbres en espalier, les meules de foin…
La composition est organisée classiquement
en trois bandes horizontales. Quelques arbres
au feuillage léger, animé par le vent, assurent
de manière habile la transition entre les zones
distinctes. Ernest Hareux est l’auteur d’un
ouvrage à l’usage des artistes intitulé Les
Arbres, leurs différentes essences, arbres forestiers,
arbres de haute futaie (1902). Il décrit
minutieusement, par de nombreux dessins, des
arbres comme ici, étranges silhouettes décharnées
qui s’élancent dans le ciel par-dessus les
montagnes en donnant une profondeur remarquable.
La masse pyramidale du Moucherotte
avec les Trois Pucelles est équilibrée à droite
par les bâtiments de la ferme. Le spectateur
pénètre de manière dynamique dans le tableau
en suivant les puissantes lignes obliques du
chemin, des traces dans la neige et du fossé du
canal d’irrigation. Elles convergent vers le point
de fuite, habilement décalé et situé au centre
des bâtiments éclairés du petit séminaire.
Les personnages, Ernest Hareux et son ami l’abbé
Guétal, conversent au milieu de l’allée boueuse.
Nous pouvons imaginer qu’ils échangent des
souvenirs ou quelques conseils avisés de peinture
puisqu’ils sont tous les deux pédagogues et
que l’abbé considère son ami comme son maître
en peinture. L’effet crépusculaire ajoute du flou
aux contours qui sont baignés d’une douce
lumière. L’ensemble de la scène bénéficie d’une
harmonie de tons bruns et blancs subtilement
colorés. La neige, la terre et les flaques d’eau
reprennent en écho les couleurs du ciel.
Dans cette oeuvre au réalisme cher à l’artiste,
on trouve cependant une mélancolie dont la
source est peut-être à chercher dans la crainte
de la disparition de son ami. Laurent Guétal,
peintre et professeur au petit séminaire, était
déjà malade et devait décéder quelques mois
plus tard, en février 1892.
Cette oeuvre majeure dans la production de
l’artiste est présentée au Salon de Paris en 1892
et aussitôt achetée par la Ville de Grenoble.
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