(Sans titre)
Peu d’éléments biographiques sur Roelant
Roghman sont aujourd’hui connus et encore
récemment, on ignorait ses dates de naissance et
de mort. Le mérite d’avoir fait le point sur l’artiste
revient à Van der Wyck, Kloek et Niemeijer
en 1990. Roghman se distingue surtout comme
dessinateur, peintre et graveur. Le biographe
Jacob Houbraken rapporte qu’il était borgne, il
cite ce célibataire parmi les meilleurs amis de
Rembrandt et de Gerbrandt van den Eeckhout
et comme maître de Jan Griffier. Son père et ses
deux soeurs, Magdalena et Geertruydt Roghman,
font également une carrière artistique,
notamment dans le domaine de la gravure.
Aujourd’hui, on associe Roghman à la fois
à ses fines études de châteaux, exécutées en
partie en 1646-1647, et à ses paysages dessinés,
rocheux et boisés, compositions dans
lesquelles il combine habilement des motifs
rapprochés et éloignés (MG D 699). Ces derniers
dessins reflètent des expériences visuelles,
vécues lors d’un long voyage en Italie, au
milieu des années 1650, qui jouent aussi un
rôle important dans la composition de ses
paysages peints, sévères et sauvages.
Ses dessins naer het leven (d’après nature)
sont aujourd’hui moins connus et ils ne sont
conservés qu’en petit nombre. Ils n’ont également
rien de commun avec la série des quelque deux cent cinquante châteaux hollandais dessinés,
dont deux cent vingt sont encore connus,
fruit sans doute d’une commande car réunis
dans un recueil à part[1]. Le dessin de Grenoble
fait partie du groupe de dessins le plus hétérogène
de Roghman et le moins étudié. On
constate que les premiers dessins remontent
à 1645, au tout début de sa carrière. Deux
dessins de ce type sont conservés à Paris, à la
Fondation Custodia, dont Paysage avec arbres,
trois granges et clocher et Maisons et arbre au
bord de l’eau proche d’un pont[2] (Inv. 2489). On y
retrouve le même papier crème, la même utilisation
très libre de la pierre noire pour dessiner
les contours, notamment le feuillage et les
hachures parallèles, et le même traitement du
lavis appliqué très généreusement.
Il est intéressant de faire le lien avec un paysage
à l’eau-forte, issu de la deuxième série gravée
de paysages hollandais[3] (Amsterdam, Rijksmuseum). Roghman y
représente un fleuve paisible et serein près de
Maarseveen, à proximité d’Utrecht . La composition
rappelle le dessin de Grenoble, construit
sur des lignes diagonales délimitant les bandes
de terre et le cours d’eau. La feuille porte sur le
verso quelques détails architecturaux et surtout
une inscription intéressante indiquant que le
marchand Coclers a acquis cette oeuvre dans la
Kalverstraat, le 13 mars 1793, comme oeuvre de
Jacob Koninck, sans malheureusement donner
plus de précisions sur son origine. En effet, des
liens avec l’école de Rembrandt y sont visibles,
de sorte que cette attribution à un élève du
maître n’est pas entièrement dénuée de sens. Si
Roghman ne fut jamais l’élève de Rembrandt,
chacun des deux artistes connaissait bien, selon
Houbraken, l’oeuvre de l’autre.
[1] Voir Houbraken, 1718, I, p. 173.
[2] Voir Schatborn, 2010, n° 153 et 154, repr.
[3] Voir Hollstein, 1949-, XX, n° 15.
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