La Vierge à l'Enfant en présence d'un saint franciscain (saint François d'Assise ou saint Antoine de Padoue)

Il ne semble pas faire de doutes que ce dessin est
lombard – et plus précisément milanais – et qu’il
date vraisemblablement des années 1620-1630.
Les raisons stylistiques de cet ancrage géographique
sont à chercher dans une façon de faire,
que l’on retrouve dès le début du XVIe siècle dans
les dessins de Gaudenzio Ferrari et de Bernardino
Lanino, consistant à penser la mise en place
des dispositions en clair-obscur avec des accents
de gouache blanche. Cette matrice stylisticotechnique
gaudenzienne et lanienne est, il est
vrai, un procédé qui s’est répandu dans toute
l’Italie du Nord, puisque les Tintoret père et fils
ont également travaillé leurs dispositions en
utilisant les mêmes médiums, en les étendant
toutefois à l’huile, les rapprochant ainsi des
bozzetti peints. L’ancienne et peut-être vraisemblable
attribution au peintre milanais Giovan
Battista Crespi, dit il Cerano, constitue le point
de départ de ces considérations stylistiques, qui
comme on vient de le voir, trouvent leur traduction
dans une tradition locale et également dans
l’œuvre graphique même du Cerano. Il serait à
ce propos utile de rappeler qu’une partie des
dessins qui lui sont maintenant donnés, à lui ou
à ses suiveurs, conservés aux Musei Civici del
Castello, étaient naguère catalogués sous le nom
de Gaudenzio Ferrari ou de son école. Quelques
feuilles du Cerano peuvent en effet être mises
en regard de celle de Grenoble. Nous citerons en
particulier celle conservée au Museo di Capodimonte
(dont l’attribution au maître lombard a
été proposée par Giulio Bora) étudiant l’iconographie
de Jésus parmi les docteurs. La tonalité
d’ensemble dominée par un camaïeu d’ocre
brun en est grandement comparable, tout
comme l’usage de puissants rehauts de gouache
blanche soulignant les parties tournantes des
drapés et des mains. Cette technique quasi
picturale semble unir les deux feuilles. Mais
nous n’irons pas jusqu’à dire que l’attribution
du dessin de Naples doit s’étendre à celui de
Grenoble. La raison principale de cette prudence
réside dans le fait que le nom de Cerano, avancé
pour la feuille napolitaine, est certes très séduisant
mais non avéré. Aucune peinture due à ses
pinceaux n’en reprend le dispositif ; il en est de
même pour le dessin grenoblois.
Nous avions commencé la rédaction de cette
notice en disant que nous étions en présence
d’un dessin lombard, milanais plus précisément.
Il faudrait maintenant ajouter un autre
adjectif : céranien. L’atelier de Giovan Battista
Crespi était important. De nombreux assistants
l’entouraient. Il a formé des élèves dont
certains ont acquis une certaine notoriété.
Citons Melchiorre Gherardini (1607-1675),
son plus proche collaborateur, les frères
Lampugnani, Giovan Francesco (1588-1651)
et Giovan Battista (1590-1640), qui ont probablement
fréquenté la bottega de Cerano
entre 1606 et 1614. Un certain nombre de
dessins de ces trois artistes sont connus. Mais il
faut reconnaître que les points d’attache avec
le dessin de Grenoble ne sont également guère
convaincants. Nous préférons rester donc
circonspects en le mettant dans l’entourage
proche de Cerano.
Enfin, il est curieux de constater que certains
bozzetti sur papier du peintre génois Alessandro
Magnasco (1667-1749), installé toutefois à
Milan, présentent de notables points communs
stylistiques et dispositionnels avec ce dessin. La
quasi-totalité d’entre eux sont en effet des
études surchargées de gouache blanche pour
des tableaux d’autel, dotés de cintres à oreilles
préparatoires au format supposé du tableau. Il
est vrai que ces dessins, datés des années 1735,
dérivent en droite ligne de cette même tradition
gaudenzienne, mâtinée, bien entendu,
d’autres références stylistiques (notamment
vandyckiennes).
Découvrez également...
-
Lance de chasse
s.d. -
Un cavalier et deux personnages dans un paysage
début XVIIIe siècle -
Religieux agenouillé de profil
XVIe siècle