Descente de Croix

Marco MARCHETTI dit Marco DA FAENZA
XVIe siècle
Plume et encre brune, lavis d'encre brune sur papier vergé beige doublé
15,2 x 10,7 cm
Crédit photographique :
VILLE DE GRENOBLE / MUSÉE DE GRENOBLE-J.L. LACROIX
Acquisition :
Legs de Léonce Mesnard en 1890, entré au musée en 1902 (lot 3551, n°1526)

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Produit typique du courant maniériste des années 1570, visant à un pathos et une complexité de la composition aux multiples références (en particulier celle à Michel-Ange), ce dessin illustre un moment de l’art italien que Roberto Longhi considérait comme un « cadavre » à surmonter. Marchetti reçut sa formation loin de sa patrie, d’abord à Rome, où il travailla dès 1545 aux fresques du château Saint-Ange, en 1550, avec Vasari, au Palazzo Altoviti, puis en 1552 au décor de la Villa Giulia, et en 1553 au Palazzo Sacchetti, au moment où Francesco Salviati y peignit la grande décoration du grand salon. Il s’installa ensuite à Florence, après avoir rédigé son testament à Faenza en 1564. Il travailla alors à l’apparato des décorations pour les festivités du mariage de Francesco de’Medici, à Florence, sous la direction de Giorgio Vasari (1565), puis au Palazzo Vecchio, où il était déjà intervenu. Vasari lui consacre un long paragraphe dans la Vie de Primatice, parue en 1568, pour louer ses dons de peintre de grotesques, sa spécialité : « è rarissimo in alcune cose, fra gl’altri di Romagna, Marco da Faenza (che così è chiamato e non altrimenti) per ciò che è pratico oltre modo nelle cose a fresco, fiero, risoluto e terribile, e massimamente nella pratica e maniera di far grottesche… ». Vasari, qui fit travailler Marco Marchetti en particulier dans les parties décoratives du plafond du Salone de’Cinquecento (Sala Grande) du Palazzo Vecchio (1563-1565), le cite également dans la Vie des artistes académiciens. Après 1565, l’artiste se réinstalla dans sa ville natale et y resta jusqu’en 1572. Le présent dessin se rattache plutôt aux tableaux d’autel qu’il réalisa à Rimini : Conversion de saint Paul (S.Maria dei Servi) et Montée au Calvaire (sacristie de l’église du Suffraggio). Ces deux œuvres passèrent jusqu’à une période récente sous le nom de Federico Zuccaro, dont on constate aussi l’influence dans le dessin exposé, fortement marqué par le climat religieux austère de la Contre-Réforme. Le thème de la Pietà fut traité par Marco da Faenza dans un tableau destiné à l’église de l’Osservanza, à Faenza, antérieure au nouveau séjour à Rome, sous le pontificat de Grégoire XIII (1572-1583). La carrière de Marco da Faenza présente donc la particularité d’une circularité entre la Romagne et Rome, avec des incursions florentines, et d’une bipolarité de son activité, tant de fresquiste spécialisé dans les parties ornementales (ses capriciose figure) que de peintre de tableaux d’église.
De lui Baglione rappelle « che sono suoi molti disegni di diversi scudi d’arme con figurine, e puttini tanto belli e gratiosi, che in quel genere sperar più non si poteva ; e furono in legno intagliati ». Ce sont en effet ses dessins décoratifs qui sont les plus nombreux à nous être parvenus. La manière très particulière de poser le lavis en larges coulées associée à la finesse des contours à la plume permettent en général de reconnaître assez aisément son mode d’expression graphique.
On y note des similitudes avec l’écriture brisée de Boscoli (figure en haut à droite) et celle, parfois également assez contrastée, de Cesare Nebbia. La facture appuyée du dessin exposé se retrouve dans d’autres études sur le thème de la Pietà, par exemple Christ mort porté par des anges (GDSU12570 F), sans doute antérieur à celui de Grenoble, Christ mort soutenu par un personnage et deux anges (GDSU 12600), et aussi Flagellation du Christ (GDSU 2062 S), qui se trouvait précédemment classé avec les dessins de l’entourage de Cigoli. Comparée à l’étude préparatoire très libre de la Déposition de Croix (Cambridge, Fitzwilliam Museum, inv. PD.29- 1956), celle de Grenoble apparaît plus contrainte, voire figée : il s’agit peut-être d’un ricordo.

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