Fleurs

Issu d’une grande famille protestante de Montpellier, Frédéric Bazille est promis à une carrière de médecin. Il entre pourtant en 1862 dans l’atelier de Gleyre à Paris où il fait la connaissance de Monet, Sisley et Renoir. Monet, dont il sera souvent le modèle et le soutien financier, l’entraîne en forêt de Fontainebleau puis à Honfleur, et c’est côte à côte qu’ils se confrontent à la peinture de plein air. Essayant comme ses camarades de forcer les portes du Salon avec des sujets empruntés à la vie moderne, Bazille tente une synthèse entre la peinture de figure et le paysage. Mais aux ciels brumeux des côtes normandes qui inspirent Boudin, Jongkind ou Monet, Bazille préfère la lumière crue de son Languedoc natal. Sa Réunion de famille, qui lui vaut les honneurs du Salon de 1868, campe ainsi ses parents, son frère, son oncle et sa tante ainsi que ses cousines sur la terrasse du domaine de Méric, près de Montpellier. C’est pour sa cousine Pauline des Hours, présente dans cette scène, que Bazille peint la même année ce tableau de Fleurs, légué au musée en 1937 par un de ses descendants. Cette nature morte, ambitieuse par la taille et la profusion des espèces florales, a d’ailleurs sans doute été réalisée dans la propriété familiale de Méric. Sur une console de marbre Louis XV trône un vase de faïence de Montpellier garni d’un énorme bouquet de dahlias, d’héliotropes et d’amarantes, entremêlés dans un apparent désordre. Au mur, une bignone laisse courir son feuillage dont émergent de petites fleurs orange. Sur la table, un autre bouquet de dahlias est répandu comme une cascade de pompons colorés. La lumière, venue de la droite, fait vibrer les textures et montre ici la capacité de l’artiste à saisir les moindres nuances colorées de ces fragments de nature que sont les fleurs. Loin des influences de Monet et de Manet, ce tableau apparaît plutôt comme un hommage direct à Delacroix, et en particulier au Vase de fleurs sur une console de 1848-1849.