Marthe et Marie
Suivant dans sa démarche l’exemple célèbre de Nicolas Poussin, Jacques Pilliard part en 1837 pour l’Italie où il voyage avant de se fixer à Rome. Il y demeure jusqu’en 1890 et bénéficie, au début de son installation, des conseils précieux d’Ingres, alors directeur de l’Académie de France. Estimé de son vivant, Pilliard envoya régulièrement ses tableaux d’histoire ou d’inspiration religieuse au Salon à Paris. Les trois œuvres du musée de Grenoble, La Mort de Rachel et la naissance de Benjamin, Jésus chez Marthe et Marie (pour lequel il obtint une deuxième médaille) et Une Peste furent respectivement exposées aux Salons de 1842, 1844 et 1845. C’est à la suite d’une présentation au Salon de Grenoble en 1850 que Jésus chez Marthe et Marie fut acheté à l’artiste par le musée, qui acquit ensuite, en 1899, le dessin préparatoire de l’œuvre. Jésus, en route pour Jérusalem, s’arrête à Béthanie chez les sœurs de Lazare. Marthe, qui s’est occupée à servir l’invité, se plaint auprès de Jésus de ce que sa sœur ne l’aide pas, mais celui-ci lui enseigne que c’est Marie qui a adopté l’attitude juste. S’inspirant d’une gravure de Louis Simonneau réalisée d’après un tableau d’Antoine Coypel aujourd’hui disparu, Pilliard décrit l’épisode avec un sens de la mise en scène néoclassique empreint du souvenir d’Ingres et de David. Les figures des trois protagonistes, vêtues de lourdes draperies telles des statues antiques, sont éclairées par la gauche et se détachent sur un décor dépouillé tandis que les personnages secondaires, deux disciples, une servante à l’allure de cariatide portant une cruche sur la tête et deux hommes dans l’escalier, demeurent dans la pénombre. Le jeu des regards, des gestes et des postures traduit à lui seul l’essentiel de la scène : Marie, agenouillée aux pieds du Christ, les deux mains croisées devant elle, dans une écoute contemplative ; Marthe, la tête inclinée en signe de désapprobation, les mains dirigées vers sa sœur et la servante, suggérant les tâches non accomplies ; Jésus, l’index de la main droite pointant le ciel, la main gauche ouverte dans un geste d’accueil à Marie. Pilliard atteint ici un équilibre classique qui mêle savamment majesté des figures, douceur du coloris et retenue des attitudes.
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