Peupliers à Tivoli
Grâce au soutien des Amis du musée, la collection
d’arts graphiques de Grenoble a pu
s’enrichir de dix-sept dessins de Simon Denis
– certains recto verso – lors de la vente de son
fonds d’atelier par ses descendants, en 1992.
Cet achat se justifie d’autant plus que le musée
de Grenoble possède une Vue des cascatelles
de Tivoli, signée et datée de 1795, avec sur la
colline de droite la représentation de la villa
de Mécène[1]. L’esquisse à l’huile présentée ici
est probablement la plus séduisante de cet
ensemble.
L’artiste a longtemps séduit par son précieux
fini. Non sans malice, Van Eynden dit qu’il
peint des vaches hollandaises dans des paysages
italianisants pour créer plus de variété[2].
Aujourd’hui, on le recherche surtout pour
ses esquisses à l’huile. Leur redécouverte par
l’histoire de l’art au début des années 1980 a
contribué à dépoussiérer et à reconsidérer
toute une génération de peintres de paysages[3].
Ami du paysagiste et peintre animalier Balthasar
Paul Ommeganck, Denis reçoit sa première
formation à Anvers. Il travaille dès 1775 à Paris
pour le marchand Jean-Baptiste-Pierre Lebrun
qui finance en 1786 son voyage en Italie. À la
vente de 1992 citée ci-dessus (n°201), vingt et
une lettres de Lebrun adressées à Denis entre
1797 et 1812 indiquent que l’artiste cherchait
dans ce pays des peintures de maîtres anciens
pour le compte du marchand.
Annoté sur le verso, le dessin de Grenoble
représente des arbres à Tivoli. La composition
est d’une étonnante fraîcheur et d’une grande
simplicité : ce sont surtout les peupliers bordant
le chemin qui ont retenu l’attention de
l’artiste. En effet, ces derniers sont nombreux
autour des fameuses cascades de Tivoli, le locus
amoenus (« le lieu agréable » ou « idylle ») classique de l’art européen. L’artiste s’essaie à
représenter le frémissement du vent dans leurs
branches. La collection comprend trois autres
vues de Tivoli, à la plume et au lavis : la plus
importante montre le site avec les fameuses
cascades (MG 1992-19-3), une deuxième, la grotte
de Neptune (MG 1992-19-10) et la dernière,
les effets de lumière au lever du soleil dans
les pins, les cyprès, les peupliers et les chênes
(MG 1993-19-2).
C’est en 1789, et en compagnie d’Élisabeth
Vigée-Lebrun et de François Ménageot, que
l’artiste visite Tivoli. Ce fait est relaté par tous
les biographes de Vigée-Lebrun[4]. Sur une
esquisse réalisée par Simon Denis, vendue
chez Christie’s à Paris, le 22 juin 2006 (n°56),
on voit Vigée-Lebrun dessinant la cascade
en compagnie de sa fille Julie et d’une gouvernante.
L’épouse de son ancien protecteur
habite même quelque temps chez lui à Rome.
D’autres sorties dans ce jardin de la campagne
romaine ont lieu dans les années 1790, comme
en atteste en particulier une peinture conservée
à Anvers et datée de 1793[5].
Installé à Rome puis à Naples, où il travaille
pour la cour de Joseph Bonaparte, Simon
Denis fait une belle carrière jusqu’à sa mort
en 1813 et oeuvre pour les grandes personnalités
de l’époque, aussi bien pour la vieille
aristocratie européenne que pour la noblesse
d’Empire.
[1] Simon Denis, Vue des cascatelles de Tivoli, huile sur toile, 1,50 x 2,00 m, MG 69.
[2] Voir Van Eynden et Van der Willingen, 1816-1820, III, p. 315.
[3] Voir le magnifique cat. exp. Paris, Mantoue, 2001.
[4] Voir Vigée-Lebrun, Souvenirs de Madame Vigée-Lebrun, Paris, 1986, p. 186.
[5] Anvers, Koninklijk Museum voor Schone Kunsten, Inv. n°1051 ; voir cat. exp. Ixelles, 1985-1986, n°259, repr.
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