La Lune rebelle

Rebecca HORN
1991
850 x 350 cm
Crédit photographique :
VILLE DE GRENOBLE / MUSÉE DE GRENOBLE-J.L. LACROIX
Acquisition :
Achat à la Galerie de France en 1992

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À la fin de ses études d’art à Hambourg en 1964, Rebecca Horn contracte une grave infection pulmonaire qui la contraint à passer un an dans un sanatorium. De cette année d’isolement, durant laquelle ses parents mourront, l’artiste garde l’empreinte d’une souffrance qui va nourrir l’ensemble de sa création. Dès lors ses œuvres (performances, films, installations, dessins, écrits) s’appuient sur son vécu et ses angoisses, un substrat biographique auquel sont intégrées diverses références aux avant-gardes historiques. Certains objets (plumes, tuyaux, entonnoirs) comme certains matériaux de la tradition alchimique (mercure, sel, soufre) réapparaissent régulièrement dans ses installations mécaniques, véritables mises en scène poétiques évoquant les remous de l’existence. Se référant fréquemment aux symboles de la pensée rosicrucienne et instaurant des rapports inhabituels avec l’objet, l’artiste cherche à pénétrer intimement la conscience du spectateur.
La Lune rebelle est constituée de dix machines à écrire suspendues au plafond, le clavier tourné vers le sol. S’imposant au regard de façon incongrue, elles font écho aux propos de Georges Gurdjieff, figure majeure de l’ésotérisme du début du XXe siècle, qui voyait la plupart des êtres humains vivre comme des mécaniques inconscientes réagissant à des stimuli externes sans pouvoir se maîtriser. Ici, les machines sont animées : un cliquetis discontinu accompagne le va-et-vient des chariots et le déroulement larmoyant d’un ruban encreur dans une sorte de « communion mécanique » qui atteint son paroxysme quand le rapprochement de deux blocs scripteurs fait jaillir une étincelle en bout de ligne. Au feu de la rencontre fait contrepoint le miroir d’argent de la lune de mercure posée au sol, métaphore de l’opposition entre réflexion calme et énergie créatrice. Allégorie d’une harmonie spirituelle contrariée entre l’Homme et l’Univers, cette théâtralisation illustre les aléas de la vie et l’unité dialectique des contraires symbolisée ici par la dualité des énergies et des matières.

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