L'Aqueduc à Sassenage

Jean-Alexis ACHARD
XIXe siècle
19 x 28,4 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Don de Léon de Beylié en 1900

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Considéré comme le père de l’école dauphinoise, Jean Achard reçoit dans sa jeunesse les leçons du peintre Isidore Dagnan, avant de se rendre à Paris en 1833 où il copie les maîtres hollandais au Louvre. À partir de 1839, il présente régulièrement des œuvres au Salon, avec une médaille de 3ème classe en 1845 et une de 2nde classe en 1862. Dès 1846, il fréquente les peintres de l’École de Barbizon et compte parmi ses amis Jean-Baptiste Camille Corot, Théodore Rousseau, Charles-François Daubigny, Narcisse Diaz de la Peña et François-Louis Français qui l’entraînent à peindre « sur le motif » en région parisienne. S’il voyage en France et à l’étranger – et notamment en Égypte avec des Saint-Simoniens où il est séduit par l’éclat des paysages d’Orient –, il s’est surtout attaché à peindre les sites du Dauphiné, au relief accidenté mais baignés d’une lumière éblouissante. À côté de nombreux dessins réalisés sur le vif, Jean Achard, excellent dessinateur, réalise aussi des aquarelles très abouties qu’il destine à la vente. Il connaît des difficultés financières tout au long de sa carrière et ces œuvres assez poussées, semblables à de petits tableaux, lui permettent de gagner sa vie et de se faire connaître. Il représente ici le pont de Sassenage, village au pied du Vercors, situé à 4 km de Grenoble et célèbre pour ses « cuves », figurant parmi les « sept merveilles » du Dauphiné. Ce site devient rapidement incontournable pour les paysagistes amateurs de lieux pittoresques, qui aiment à s’y retrouver côte à côte pour peindre sur le motif, à l’exemple de Jules Coignet, Louis-Hector Allemand ou Louis Vagnat. Cet aqueduc, vraisemblablement canal d’alimentation d’un moulin, est toujours visible aujourd’hui. Par sa technique et sa composition, ce paysage offre un habile compromis entre réel et imaginaire. Achard répète en effet une même formule pour la construction de ses paysages, réutilisant et agençant différemment les mêmes éléments : un pont, un torrent, des rochers, des arbres torturés, comme cette branche qui vient rythmer verticalement la partie gauche de la composition. Par une touche flochetée[1] – saupoudrant ici et là quelques minuscules points de couleur blanche qui soulignent la surface des feuilles, l’arête des rochers ou la façade des maisons –, il parvient à donner l’illusion du scintillement de la lumière, annonçant déjà le travail des impressionnistes. Calant un premier plan sombre à droite, il entraîne l’œil du spectateur vers des lointains clairs, concentrant ses effets lumineux sous l’arche du pont. Ses feuillages mêlent subtilement toutes les nuances de vert, du plus tendre au plus sombre. Jean Achard représente ce même site dans une petite feuille conservée dans les collections du musée (MG 2005-0-13 ), mais selon un autre point de vue, et avec un traitement plus enlevé, plus libre, presque abstrait. Ce dessin au crayon graphite et à l’encre brune, plus proche d’un croquis réalisé sur le motif, est très certainement une page détachée d’un carnet.


[1] Se dit d'une touche en petits flocons.

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