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L’utilisation du papier bleu, la technique et le style nerveux de cette petite Annonciation, classée parmi les anonymes français du XVIIIe siècle, permettent de la rendre sans difficulté à Claude-Guy Hallé, père de Noël (MG 2011-0-94
) et beau-père de Jean Restout
. L’œuvre peut être mise en relation avec une peinture monumentale illustrant ce sujet, commandée à Hallé pour le décor du chœur de la cathédrale Notre-Dame de Paris.
Le chœur gothique de Notre-Dame fait l’objet d’une importante campagne de travaux au début du XVIIIe siècle . A l’image d’autres églises comme Saint-Merry, il s’agissait de remettre au goût du jour l’église gothique avec un habillage moderne, constitué de marbres polychromes, de boiseries et de peintures. Les conditions de cet important chantier sont parfaitement connues. Peu avant sa mort, le chanoine de Notre-Dame Antoine de La Porte, avait demandé l’autorisation au roi de financer sur sa fortune personnelle six grandes peintures, retraçant les grands épisodes de la vie de la Vierge et destinées à prendre place au-dessus des stalles du chœur. Après la mort du chanoine en 1710, ce sont au final huit compositions qui sont commandées à cinq des meilleurs peintres d’histoire du moment : La Nativité et L’Adoration des mages (Paris, Louvre) à Charles de La Fosse, La Visitation (Notre-Dame) à Jean Jouvenet, Le Repos pendant la fuite en Egypte (Arras, musée), La Purification (Paris, Louvre) à Louis de Boullogne, Jésus parmi les docteurs et L’Assomption (perdue) à Antoine Coypel. Claude-Guy, qui reçoit ici l’une des commandes les plus importantes de sa carrière, est chargé quand à lui d’exécuter L’Annonciation.
Nicole Willk-Brocard a retracé l’histoire complexe de cette peinture. Le tableau, retiré de la cathédrale avec les autres au moment de la Révolution, est identifié avec une peinture aujourd’hui conservée au musée du Louvre. Or cette dernière est datée de 1717 et sa composition, proche du dessin de Grenoble, ne correspond pas aux estampes du XVIIIe siècle montrant les tableaux en place à Notre-Dame. La gravure montrant l’élévation droite du chœur, dessinée par Jacques-François Blondel et publiée dans l’ouvrage de Mariette en 1727[1] , reproduit en effet une Annonciation bien plus dynamique dans sa structure. Comme l’a souligné Nicole Willk, il est possible que la première version, mise en place en 1715, ait quitté la cathédrale vers 1717 pour des raisons encore inexpliquées et qu’elle y ait été remplacée par le tableau du Louvre[2] . La seconde version se démarque surtout par une composition bien plus calme, plus en accord avec les tableaux des autres artistes.
Si le dessin de Grenoble s’inscrit bien parmi les études en rapport avec la commande de Notre-Dame, c’est de cette dernière toile qu’il est le plus proche. L’œuvre peut ainsi être située entre 1715 et 1717.
[1] Pierre-Jean Mariette, L’architecture françoise […], Paris, 1727, 2 vol., pl. 3.
[2] Cette première version est proposée à la vente par Hallé en mars 1735. Le Mercure de France annonce la parution d’une estampe d’après le tableau qu’il commente de façon très élogieuse : « Le sujet est une Annonciation, traitée d’une manière noble dans le chœur de Notre-Dame », voir Willk-Brokard, 1995, p. 290, sous n° C55.
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