(Sans titre)

L’attribution de ce dessin au Napolitain Andrea
di Lione repose sur l’existence de dessins d’académies,
conservés principalement au museo di
Capodimonte à Naples et aux Offices à
Florence. Ces derniers portent des annotations
anciennes mentionnant le nom du peintre,
lesquelles ont été prises en considération, voire
entérinées par les spécialistes du dessin napolitain,
appuyés en cela par le biographe du
peintre, Bernardo De Dominici : « Andrea a
beaucoup travaillé le dessin et plus que tout le
nu. On trouve d’ailleurs beaucoup d’études
d’académies très bien dessinées, des études de
têtes et de parties de corps telles qu’en réalisait
son maître [Aniello Falcone]. » Andrea di
Lione utilise pour ce type de dessins une
sanguine assez grasse (ce n’est pas le cas pour
ses études de composition, réalisées avec le
même médium, dont l’application se fait de
manière toute légère), qu’il applique sous la
forme de traits bien ostensibles plus ou moins
denses selon les degrés de suggestion mimétique
(barbe et cheveux) et d’expression volumétrique
(les tournants des membres anatomiques
comme les bras et les muscles du torse). Cette
façon de faire, Andrea l’a héritée de son maître,
Aniello Falcone[1].
Si le dessin de Grenoble montre un nu masculin
allongé inactif, il ne semble pas en revanche
qu’il soit à proprement parler une académie,
réalisée devant le modèle, comme le furent
vraisemblablement celles susmentionnées. Tout
d’abord parce que la figure dessinée est un
satyre, comme le montrent les cornes et les
oreilles pointues qui dépassent de la chevelure,
ensuite parce que l’on sait que Lione copiait ou
pastichait des motifs élaborés par le peintre
génois Giovanni Benedetto Castiglione, que le
Napolitain a pu rencontrer dans la cité parthénopéenne
en 1635, et à nouveau à Rome dans
les années 1640. Or, le motif du satyre et du
faune parcourt l’œuvre de Castiglione à travers
les nombreuses bacchanales qu’il réalisa tout au
long de sa carrière. Il ne semble pas qu’Andrea
di Lione ait directement copié une figure issue
du répertoire de Castiglione. Andrea adapte. Il
le fait de la même manière dans un dessin
conservé au musée des Beaux-Arts de Dijon[2],
étudiant la figure d’un personnage bachique, dont l’attribution au dessinateur
napolitain peut être soutenue[3], et qui tout
autant n’apparaît pas dans l’œuvre de Castiglione.
La présence à Naples pendant quelques
années (d’août 1633 à la fin de l’année 1637)
du Jardin de Vénus et de la Bacchanale des
Andriens de Titien dans la collection du vice roi,
le comte de Monterrey (en attendant d’être
transférés à Madrid dans celle du roi), fameux
modèles en matière d’iconographie bachique,
tout comme la circulation de tableaux de
Poussin sur ce thème, ont dû multiplier les
sources à partir desquelles Andrea di Lione a
pu s’alimenter. À la lueur de ce dessin, on peut
cependant affirmer que la feuille de Grenoble
a été coupée, non seulement sur le côté gauche,
mais également par le haut, comme le laisse
suggérer le surprenant motif de la jambe vue
d’en haut, celle vraisemblablement du dessinateur,
laquelle apparaît tronquée. Pourrait-on
penser qu’Andrea avait à l’origine dessiné un
satyre de pied en cap mais aussi un groupe de
figures ? Cela reste une question.
Aucune peinture connue d’Andrea di Lione ne
reprend à notre connaissance le motif du satyre
dessiné sur la feuille grenobloise.
[1] Voir notamment les académies conservées au Louvre, inv. 9622 recto et verso et inv. 9621. Il se pourrait cependant qu’elles puissent revenir à Andrea di Lione.
[2] inv. JdCP4I°18-7/10.
[3] Marguerite Guillaume classe ce dessin dans son catalogue sous « imitateur de Giovanni Benedetto Castiglione ». Dans la notice, elle mentionne l’avis de Mario Di Giampaolo qui le donne à Andrea di Lione. Cette idée nous est également venue lorsque nous avons vu le dessin au musée.
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