Paysage

Herman SAFTLEVEN
vers 1650
Graphite, trait d'encadrement à la plume et à l'encre brune sur papier vergé beige contrecollé en plein sur un montage cartonné.
20 x 27,8 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Legs de M. Léonce Mesnard en 1890, entré au musée en 1902 (lot 3548, n°1790).

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Depuis son entrée au musée de Grenoble, ce dessin est attribué à Jan Griffier (1652-1718) ou à son fils Robert, paysagistes hollandais actifs en Angleterre à la fin du xviie et au début du XVIIIe siècle et tous deux imitateurs d’Herman Saftleven. En fait, le dessin revient incontestablement à Herman Saftleven lui-même.
Dezallier d’Argenville écrit à propos des dessins de cet artiste : « Ses desseins au crayon noir sont estimés, étant d’une touche ferme & hardie ; ce sont presque tous des vûes du Rhin. Sa manière un peu ronde de feuiller les arbres, est ce qui les fera connoître[1]. »
Né à Rotterdam et frère cadet de Cornelis (MG D 169), Herman Saftleven s’installe en 1632 à Utrecht où il vit jusqu’à sa mort. L’artiste y occupe des fonctions officielles à la guilde de Saint-Luc et figure parmi les peintres respectés de la ville qu’il dessine d’ailleurs à de multiples reprises. Paysagiste reconnu, il s’est aussi essayé à d’autres genres : vers 1635, il peint quelques intérieurs d’étables avec des paysans et, beaucoup plus tard, à la fin des années 1670, il aborde un tout nouveau sujet en réalisant de magnifiques études de plantes aquarellées. L’artiste doit sa célébrité à ses peintures et à ses vues fluviales et devient un véritable spécialiste renommé dans ce genre (on l’appelle souvent Rijnstroomschilder[2]). Il influence jusqu’au XIXe siècle les artistes allemands et anglais. Le célèbre poète Joost van den Vondel (1587-1679) loue dans son Hollantse Parnas paru en 1660 les vues du Rhin de Saftleven, traitées d’une manière si naturelle que même la nature "se tait".
Dans les années 1640 et 1650, Saftleven voyage dans la vallée du Rhin inférieur, moyen et supérieur, et peut-être aussi au bord de la Moselle. Il est impossible de préciser la date de ce ou de ces voyages car il peut avoir séjourné à plusieurs reprises dans des régions voisines de la Hollande et facilement accessibles par bateau. Le dessin de Grenoble est l’une de ses innombrables vues de fleuve inspirées du Rhin. La vue plongeante montre une embarcation, tandis qu’à l’arrière on distingue une ruine. Des collines boisées encadrent le site et le mettent en valeur. De retour dans son atelier avec ses dessins réalisés d’après nature, l’artiste les utilise pour de nombreux tableaux qui peuvent prendre un caractère plus ou moins proche de la réalité. Le dessin de Grenoble convainc par son réalisme et date vraisemblablement des années 1650, par comparaison avec la Vue du Rhin conservée dans une collection particulière que Schulz considère peut-être comme une esquisse de voyage[3].
Une peinture sur cuivre, signée et datée de 1669 et représentant le château de Marksburg près de Braubach dans la vallée du Rhin, est une vue très dramatisée de ce célèbre site[4] alors que la Vue de Bad Breisig, datée de 1650[5] correspond bien plus à la réalité. Rencontrant incontestablement un grand succès commercial avec ses vues du Rhin, l’artiste se plaît à inventer de nouvelles mises en pages.


[1] Dezallier d’Argenville, 1762, III, p. 127.
[2] Peintres représentant le Rhin.
[3] Schulz, 1982, n° 701, ill. 147.
[4] Vente Sotheby’s, Monaco, 21 juin 1991, n° 131.
[5] Vente Sotheby’s, Londres, 24 septembre 2003, n° 140.

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