Tête d'homme barbu

Ce petit dessin est une imitation des études de
têtes d’Albrecht Dürer, peut-être une variante
libre d’après son saint Pierre, représenté sur
l’un des deux volets des Quatre apôtres de 1526[1]. L’auteur de cette feuille a donné un
aspect plus sombre au visage de l’apôtre, qui
incarne le caractère flegmatique selon Erwin
Panofsky. Ce dessin est caractéristique de la
« Renaissance de Dürer », terme qui désigne
le culte que l’on voue à l’artiste à la fin du
XVIe siècle. Cette admiration et cette vénération
pour Dürer connaissent leur apogée
à Prague, dans l’entourage de Rodolphe II.
Certains artistes, comme Hans Hofmann, le
copient à la perfection. D’autres artistes européens
tentent pareillement d’imiter son style,
par exemple Hendrick dans sa gravure illustrant
la Circoncision de 1594.
Nous situons le dessin de Grenoble vers 1600.
Son écriture peu systématique est trop confuse
pour être de Dürer ou de l’un de ses élèves.
Dürer utilise en effet la pointe de métal avec
plus de maîtrise et d’une manière plus graphique,
comme le révèlent bien les têtes barbues
connues de l’artiste, par exemple la Tête
de Saint-Pierre de 1526, conservée au musée
Bonnat de Bayonne. Le fait que la tête soit
isolée, sans indication, même sommaire, du
buste et des vêtements, tranche en faveur d’un
imitateur.
La collection de Grenoble conserve un autre
dessin d’après Dürer (MG 224). Intitulé Têtes de
Marie et Joseph, il a été donné par un certain
citoyen Bovier en 1799 et figure donc parmi
les premières feuilles entrées dans le cabinet
d’art graphique. L’iconographie en est étrange,
Marie et Joseph sont en effet peu représentés
de cette manière. Dans une peinture sur
bois de Dürer, datée de 1509 et conservée au musée Boijmans Van Beuningen à Rotterdam,
le couple encadre l’Enfant Jésus qui est absent
à Grenoble [2]. Connu depuis la fin du XIXe siècle,
ce dessin a été très tôt exclu du catalogue
des oeuvres authentiques de l’artiste. Déjà le
monumental recueil de ses dessins, rédigé par
Friedrich Lippmann[3] et comprenant neuf cent
treize numéros, n’en faisait aucune mention.
Ces deux oeuvres, ainsi que le dessin n°[MG D 1465]({shareBaseUrl} shareSingleWorkPrefix}60000000008667) , représentent bien les efforts du
musée pour présenter quelques dessins de la
Renaissance allemande, tant prisés mais déjà
très chers au XIXe siècle, en raison de l’intérêt
des musées allemands et des collectionneurs
privés.
[1] Munich, Alte Pinakothek, Inv. n°545.
[2] Rotterdam, Musée Boijmans Van Beuningen, Inv. 2447.
[3] Le dernier volume est publié en 1929.
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