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Véritable explosion de lignes et de taches, cette description champêtre révèle la maîtrise virtuose des techniques graphiques par Fragonard. Le trait est rapide, volontairement allusif ; il évoque, avec plus d’audace encore, l’écriture déjà très libre de certains dessins destinés à l’illustration du Roland Furieux. Le dessin du musée de Grenoble pourrait dater de la même période, c’est-à-dire de la fin des années 1770 ou du début de la décennie suivante. On songe également aux albums de croquis de Fragonard rassemblant des compositions d’une même liberté et d’une même indétermination formelle. Ces carnets sont aujourd’hui démantelés, seuls deux ont été préservés intègres. Ils sont conservés l’un à Amsterdam, l’autre au Fogg Art Museum .
Dans le tourbillon de formes du dessin de Grenoble, on ne distingue que progressivement la silhouette d’une paysanne (?) juchée sur une vache et descendant une petite butée, sous des frondaisons. C’est un sujet d’inspiration champêtre tel que l’artiste en réalisa plusieurs en peinture, comme par exemple *la Charrette embourbée *(Paris, musée du Louvre). En revanche, il n’est pas certain que ce dessin fut préparatoire à une composition peinte. Fragonard aimait pratiquer le dessin pour lui-même. Les traits de plume et de lavis sont posés sur une première esquisse à la sanguine, vraisemblablement liée à un autre projet. L’effet de couleur et de matière qui résulte de la superposition du lavis sur la sanguine augmente l’expressivité graphique du dessin – tout au moins pour notre regard contemporain.
Le revers de la feuille présente un dessin inédit de l’artiste, dans la même technique au lavis, tracé pareillement sur une première esquisse indépendante à la sanguine. Il s’agit d’une puissante étude de tête masculine tournée vers la droite. Les études de détails (visages, mains, draperies) sont relativement rares dans l’œuvre de Fragonard, l’artiste privilégiant les études de composition d’ensemble.