Paysage

Daniel SCHELLINKS
2ème moitié XVIIe siècle
Lavis d'encre grise sur dessin sous-jacent à la pierre noire, trait d'encadrement à la plume et à l'encre brune sur papier vergé crème
12,1 x 16,2 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Legs de M. Léonce Mesnard en 1890, entré au musée en 1902 (lot 3548, n°1714).

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Daniel Schellinks est le frère de Willem Schellinks (1623-1678). Ce dernier est un paysagiste bien connu, ayant voyagé à de multiples reprises dans les pays les plus variés, notamment en France où il séjourne en 1645-1646 et encore quinze ans plus tard, en 1661-1662. En revanche, Daniel Schellinks est bien moins connu aujourd’hui, même s’il jouit d’une certaine réputation de son vivant. Il se range parmi les artistes amateurs. Quelques-uns de ses tableaux sont conservés au Bowes Museum à Barnard Castle et à la pinacothèque de Turin alors que l’Albertina à Vienne, le cabinet d’Art graphique de Bruxelles et le Courtauld Institute à Londres possèdent plusieurs de ses dessins. Sa biographie reste lacunaire. Lors de son mariage, il se définit comme sylackenwinckelier (marchand de soie) et semble avoir connu une certaine prospérité. En effet, lorsqu’il rédige son testament en 1664, il promet de léguer à son frère Willem un album de dessins de Simon de Vlieger[1].
La feuille de Grenoble constitue sans doute l’une de ses oeuvres naer het leven, commencée en plein air et terminée ensuite dans l’atelier, où l’artiste ajoute les traits de plume et les touches de lavis. Toute la partie gauche est occupée par un talus boisé et Schellinks s’applique à le structurer, à dessiner les buissons et les silhouettes des arbres qui se découpent devant un ciel laiteux. La vue de la plaine à droite permet à la feuille de « respirer » et un minuscule berger l’anime. Le dessin de Grenoble, extrait sans doute d’un livre d’esquisses démembré depuis, reflète bien son style sans artifice et sans prétention.
Daniel Schellinks utilise ses études pour composer ses dessins finis et ses tableaux, représentant souvent des scènes de chasse. Stylistiquement, ses feuilles sont proches d’Anthonie Waterloo et de Simon de Vlieger mais par l’utilisation libre du lavis gris, elles s’apparentent aussi aux dessins de Willem Schellinks. Plusieurs oeuvres de Daniel Schellinks se cachent sans doute sous ce dernier nom, comme le montre la Route boisée avec un clocher dans l’arrière-plan, dessin vendu le 26 novembre 1984 chez Christie’s à Amsterdam (n° 95). Cette oeuvre porte une annotation correcte « D. Schellings » sur le montage.
Pieter Terwesten[2] raconte avoir vu un paysage de sa main aussi bien peint que s’il était de Wouwerman. De fait, la récente restauration d’un paysage fluvial signé, conservé chez le duc de Liechtenstein, a révélé chez l’artiste une aptitude exceptionnelle pour le rendu des effets lumineux, difficile à imaginer chez un peintre aussi peu connu et qui montre bien la familiarité de Schellinks avec la peinture de paysage à Amsterdam vers 1660[3].
De nombreux dessinateurs amateurs sont actifs durant le Siècle d’or, phénomène qui prend une ampleur sans équivalent dans les Provinces- Unies. Issus de grandes familles du pays ou pratiquant un métier lucratif, ils ne sont pas contraints de vivre de leur production artistique. Daniel Schellinks en est un exemple mais d’autres artistes comme lui sont à mentionner, par exemple l’avocat Wigerus Vitringa avec ses marines (MG D 1712) ou encore Constantijn Huygens et ses vues de ville (MG D 642).


[1] Voir De Vries, 1883, p. 153.
[2] Pieter Terwesten, 1770, p. 77.
[3] Vaduz / Vienne, inv. GE 1408 ; cat. exp. Vienne, 2007-2008, n° 60, repr.

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