Paysage montagneux

La rareté des dessins de Molyn pour les
années 1630 nous encourage à maintenir
cette feuille dans le corpus de ses oeuvres et
même à la considérer comme une des plus
belles feuilles de sa main pour cette période.
Bien qu’elle soit signée et datée, elle n’apparaît
pas dans le catalogue raisonné de Beck.
Comme l’auteur, disparu récemment, n’a pas
dressé de catalogue, même sommaire, des
oeuvres qu’il « rejette », on ignore son avis sur
cette feuille qui fut exposée sous le nom de
Molyn en 1977.
Les dégradés de couleur y sont très subtils.
Le premier plan est très contrasté, sombre au
centre et sur la gauche, alors que la lumière
éclaircit l’angle droit et permet à Molyn de
plonger les arbres du plan médian dans l’obscurité.
On note un éclaircissement progressif
des plans au fur et à mesure que l’on pénètre
dans l’espace.
Le dessin rappelle les paysages flamands d’un
Joos de Momper, sans toutefois présenter des
vues de roches aussi grandioses. Durant cette
période, Molyn s’intéresse aux grands panoramas
montagneux, un sujet qui lui est cher
jusqu’à la fin de sa vie[1]. Comme le remarque
Wolfgang Stechow en 1966, les oeuvres de
Molyn sont démodées après les années 1620 –decidedly old-fashioned – mais elles ne perdent
rien de leur beauté et de leur grandeur.
La figure humaine joue un rôle important
dans ses premiers dessins connus et elle sera
progressivement remplacée par les éléments
du paysage. Les voyageurs vus de dos sont fréquents
et ils accentuent ainsi les effets de profondeur
mais l’artiste les traite ici d’une façon
exceptionnellement monumentale. Dans ses
gravures, qui datent toutes d’avant 1626, on
trouve des voyageurs avec des chapeaux larges
assez similaires[2].
Le dessin de Grenoble est exécuté au pinceau
et au lavis gris dans des tonalités très variées
sur un dessin sous-jacent à la pierre noire. Il se
rapproche techniquement d’un Paysage fluvial
signé et conservé au Kupferstichkabinett de
Berlin, de mêmes dimensions et daté par Beck
vers 1630[3]. Ces feuilles séduisantes au pinceau
doivent procurer de la délectation et inviter le
spectateur à un voyage imaginaire.
[1] Voir pour une peinture de ce genre des années 1650, le catalogue de vente de Sotheby’s, Amsterdam, 15 avril 2002, no 27.
[2] Voir Hollstein, 1949-2010, XIX, nos 1 à 4.
[3] Berlin, Kupferstichkabinett, Inv. no 5395, voir Beck, 1998, no 61, repr.
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