Prophètes Habacuc et Ezéchiel d'après Jusepe de Ribera

Jean-Robert ANGO
XVIIIe siècle
Sanguine sur papier vergé crème
14,9 x 17,2 cm
Crédit photographique :
VILLE DE GRENOBLE / MUSÉE DE GRENOBLE-J.L. LACROIX
Acquisition :
Legs de Léonce Mesnard en 1890, entré au musée en 1914 (lot 2942).

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L’étude des dessins italiens de Grenoble a permis à Eric Pagliano de retrouver, sous une attribution erronée à Carlo Maratta, deux nouvelles feuilles de Jean-Robert Ango, qui s’ajoutent désormais à une copie bien connue d’après un dessin d’Hubert Robert, le Tombeau de Cécilia Maetella [1].
Nos connaissances biographiques demeurent très maigres sur la vie de cet artiste dont même les dates de naissance et de mort sont inconnues. Les quelques sources disponibles situent son activité à Rome durant le troisième quart du XVIIIe siècle. Son corpus, d’une grande unité, est aujourd’hui constitué exclusivement de dessins et plus particulièrement de copies dessinées en Italie d’après les antiques les maîtres anciens ou contemporains. Ango devait faire commerce de ces œuvres, en très grande majorité tracées à la sanguine ou à la pierre noire et plus rarement à l’aquarelle ou à la plume[2]. Les dessins de Grenoble, tous trois à la sanguine, peuvent être rattachés, grâce à l’identification des modèles qu’ils copient, à des groupes d’œuvres déjà connus d’Ango.
Le dessin montrant deux prophètes (MG D 527) est lié au seul séjour napolitain d’Ango, documenté entre mars et avril 1761. En partant des copies identifiées d’après des œuvres conservées à Naples, Sarah Boyer a récemment dressé une liste des quelques édifices religieux, fréquentés par Ango en compagnie de Fragonard : le Duomo, San Agostino degli Scalzi, Santa Maria Donnalbina, Santa Maria di Monteverginella, San Paolo Maggiore, Santo Spirito, la Chartreuse San Martino. Dans la chartreuse, Ango dessine le Saint Bruno en extase de Massimo Stanzione, peint sur la coupole de la chapelle Bruno, la célèbre Déploration de Ribera et surtout les douze prophètes, peints par l’Espagnol pour les écoinçons de la nef. La copie de Grenoble est la septième que nous connaissons d’après ce cycle[3]. Les deux prophètes, qui y sont représentés, sont également copiés séparément dans deux feuilles du musée de Rouen[4]. Alors que dans les autres dessins, souvent conservés par paire, les modèles sont soigneusement tracés, ici le trait est plus libre et la même feuille présente un prophète complet (Ezéchiel) et un croquis d’après un autre (Habacuc).
Le second dessin, également classé sous le nom de Maratta, est en réalité, comme nous l’a indiqué Sarah Boyer, une copie d’après l’Annonciation, peinte à fresque par Giacinto Gimignani[5] 1606-1681) à Rome, dans la chapelle de la Crucifixion à l’église San Silvestro in Capite . Il ne peut être daté avec autant de précision que les copies napolitaines mais en est très proche par la technique. Ango est mentionné à plusieurs reprises par Julien de Parme à Rome après 1761. Une grave paralysie l’ayant réduit à la mendicité, l’artiste disparaît des écrits de son ami après 1773.


[1] MG D 2710. Sanguine, H. 21,9 ; L. 31 (voir Bergatto, 1994, n° 2, p. 48-54). Le dessin original de Hubert Robert, copié par Ango, est conservé au musée des beaux-arts de Rouen (Inv. 964.4.11). Tracée à la sanguine, la feuille est d’un format plus important (H. 40 ; L. 52).
[2] Un petit ensemble d’aquarelles, exécutées pour le bailli de Breteuil (coll. part), et quelques mentions de copies à la plume et au lavis, témoignent de l’utilisation de ces techniques par Ango. Ce dernier a également réalisé des peintures dont aucune n’a été à ce jour retrouvée (Voir Boyer, 2008, p. 91-92).
[3] Au musée des beaux-arts de Rouen : Micah H. 17,7 ; L. 12,7 (Inv. 868-5-105) et Ezéchiel, H. 17,9 ; L. 12,9 (Inv. 1868-5106) ; Habacuc, H. 15,6 ; L. 12,7 (Inv. 868-5-74) et Daniel, H. 15,5 ; L. 12,8 (Inv.868-5-104). Vente Piasa 19 juin 2007, n° 101 : Haggai et Amos (H. 16 ; L. 13). Voir Boyer, 2008.
[4] Mirah et Ezéchiel, Inv. AG 1868.5.105 et 1868.5.106 ; Habacuc et Daniel, Inv. AG 1868.5.74 et 1868.5.104.
[5] Un autre dessin du musée semble être une copie française du XVIIe siècle ( ?) d’après Gimignani. Représentant La Mort de Virginie (et non de Messaline comme l’indique l’actuel inventaire), cette feuille (MG D 2212, sanguine et lavis, H. 12.3 ; L. 19.4) reproduit une composition de Gimignani, passée en vente à Londres (Phillips, Londres, 3 juillet 1990, n° 47). Le tableau a été gravé et notre dessin est dans le sens de la gravure.

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