Jeune homme tenant un cheval par la bride

Baldassare FRANCESCHINI dit IL VOLTERRANO
XVIIe siècle
Sanguine sur papier crème
21,4 x 9,2 cm
Crédit photographique :
VILLE DE GRENOBLE / MUSÉE DE GRENOBLE-J.L. LACROIX
Acquisition :
Legs de Léonce Mesnard en 1890, entré au musée en 1914 (lot 2942)

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La facture de ce dessin est fascinante. C’est littéralement une première pensée constituée d’un entrelacement de traits virevoltants à la sanguine, posés à la vitesse d’un coup de fouet, comme si l’on avait la sensation de voir le temps de réalisation infime s’écouler dans la multitude des lignes. Avant de distinguer et de reconstituer mentalement l’objet étudié par le dessinateur, c’est cet amas de traits multidirectionnels que l’on voit. Puis dans un second temps, surgit une tête d’homme, son bras droit tendu, une tête de cheval, un buste et enfin une jambe. Ainsi apparaît, sous ce réseau de traits, un jeune homme tenant vraisemblablement par la bride un cheval. On pourrait très bien appliquer cette remarque de Porbus dans Le Chef d’Œuvre inconnu de Balzac : « Il y a une femme là-dessous. » Cet effet de surprise est une apparition sémiotique.
Volterrano est l’auteur de ce dessin. L’attribution n’avait jamais été perdue. Ce dessinateur, originaire de Volterra comme son surnom l’indique, a d’abord été formé à Florence dans l’atelier de Matteo Rosselli avant d’intégrer, dans un second temps, celui de Giovanni da San Giovanni. De ces deux maîtres florentins, Volterra n’a pas gardé grand-chose dans ses dessins (à l’exception de ses dessins de jeunesse). On pourrait même dire que sa manière se démarque tout court de la tradition florentine, fondée sur la clarté de la ligne, la précision anatomique des formes, la reprise mesurée des éléments étudiés, non pas que Volterrano ne soit pas capable de réaliser des dessins aboutis, mais sa façon de mettre en place les idées graphiques se matérialise par des procédés que l’on ne rencontre guère dans la production de ses devanciers ou contemporains, appartenant à sa nation. Il faut remonter à Léonard et à son fameux componimento inculto ou le mettre en parallèle avec un contemporain né en Toscane (à Cortone) mais actif principalement à Rome, Pierre de Cortone[1], pour retrouver un mode de recherche similaire, consistant à reprendre et à répéter de manière incessante une ligne de circonscription pour faire surgir la forme mimétique, comme si le dessinateur procédait à des ratures constantes. Sa peinture se rapproche aussi stylistiquement parlant de celle de Pierre de Cortone.
Malgré l’importance numérique de son œuvre graphique (deux cents feuilles ont resurgi lors d’une vente aux enchères en 1980 chez Sotheby’s à Londres, trois cents sont conservées aux Offices, l’Albertina en possède soixante-dix), il n’a pas été possible d’agréger cette feuille à un dossier génétique déterminé. Peut-être pourrait-il s’agir d’une étude pour un sujet mettant en scène la figure d’Alexandre le Grand domptant Bucéphale. Il serait tentant de la dater peu après la commande des fresques de la villa della Petraia qui, il est vrai, s’étendit sur près de dix années (entre 1637 et 1646), disons aux alentours de 1647-1650.


[1] Voici ce que disait Mariette des dessins de Volterrano: « J’ai vu des dessins de lui qui sont tellement dans la manière de Pietro de Cortone qu’on le croirait disciple de ce grand peintre. » (Abecedario, II, 1853-1854, p. 264) ; cité parMcCorquodale, 1980, « Introduction », non paginée.

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