La Fuite en Egypte

Pierre-Charles TRÉMOLIÈRES
1729
24 x 26,7 cm
Crédit photographique :
VILLE DE GRENOBLE / MUSÉE DE GRENOBLE-J.L. LACROIX
Acquisition :
Legs de M. Léonce Mesnard en 1890, entré au musée en 1902 (lot 3560, n°395).

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En 1973, le catalogue consacré par Pierre Rosenberg et Jean-François Méjanès à l’œuvre de Pierre-Charles Trémolières, dressait un corpus d’une quarantaine de dessins de l’artiste. Signée et datée de 1729, la Fuite en Égypte de Grenoble y occupait une place importante, étant la plus ancienne composition personnelle dessinée de l’artiste. Depuis, le nombre de dessins et de tableaux réapparus demeure assez restreint.
Formé par Jean-Baptiste Vanloo, bénéficiant de la protection du comte de Caylus, Trémolières est remarqué en 1726 en remportant le second prix de peinture. En 1728, il figure parmi les nouveaux pensionnaires de l’Académie de France à Rome où il séjourne en compagnie de Boucher (MG 1739 , MG D 855 , MG D 177 ), Carle Vanloo (MG 3000 ), Subleyras[1] et Dandré-Bardon (MG 2007-0-107 , MG D 411 , MG 2011-0-93 , MG D 182 ). Le peintre quitte Rome en 1735, après un séjour prolongé pour des raisons de santé. Malheureusement, peu de temps après sa réception à l’Académie en 1737, il est emporté à l’age de trente-six ans, par une maladie du poumon. La mort de Trémolières est vécue comme une grande perte par ses contemporains auprès desquels ses talents avaient suscité de nombreux espoirs. Sa courte carrière explique aujourd’hui la rareté de ses œuvres et souligne l’importance du dessin de Grenoble. Ce dernier est à situer, par sa date, au début du séjour de jeune peintre à Rome et témoigne ainsi de ses aspirations artistiques. Comme la plupart des pensionnaires, Trémolières partage son activité entre les exercices de dessins (draperie, nu…) et les copies d’après les maîtres. Il étudie également le paysage d’après nature auquel le directeur d’alors, Nicolas Vleughels, est particulièrement attaché. En peinture, l’œuvre la plus importante réalisée à Rome est une copie d’après La Vierge et l’Enfant Jésus apparaissant à saint Antoine et saint Paul de Guido Reni, destinée au roi. Le tableau a été envoyé au musée de Grenoble en 1798 et s’y trouve encore aujourd’hui[2] .
Au sein de cette production romaine, essentiellement constituée de copies, le dessin de Grenoble est remarquable car il s’agit d’une invention personnelle de l’artiste, comme le laisse penser l’annotation "Trémolieres inv.". Préparant peut-être une peinture cintrée, qui n’a pas encore été retrouvée, la composition met en évidence l’influence qu’exerce la peinture romaine, en particulier celle de Carlo Maratta, sur le jeune Français[3]. L’abondante utilisation du lavis, les personnages légèrement allongés et animés de lignes courbes, confèrent un rythme lent et poétique à une image qui, malgré l’absence de couleur, présente un caractère pictural fort. Cette alliance entre la tradition classique et le goût baroque s’exprime de façon magistrale, à la fin de sa formation italienne, avec les sept dessins destinés à la gravure illustrant Les Sacrements .


[1] Trois dessins sont actuellement classés à Grenoble sous le nom de Pierre-Hubert Subleyras. Un Evêque tenant une mitre (MG D2633) et le Transport d’un blessé (MG D 1390) nous semblent un peu faibles pour l’artiste alors qu’un Moine en extase (MG D 2264) pourrait bien lui revenir.

[2] L’original de Reni, qui appartenait alors à la collection du marquis de Giustiniani, a été détruit à Berlin pendant la seconde guerre mondiale. Sur ce tableau voir Chomer, 2000, n° 104, p. 229-231.
[3] Voir, par exemple, le même sujet traité par Maratta à l’église San Isidoro de Rome.

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