L'Indifférent
Oeuvre acquise dans le cadre de la célébration du Bicentenaire de la Révolution en Dauphiné.
Associé aux manifestations de l’Arte povera entre 1967 et 1972, Giulio Paolini s’en détache pourtant par ses préoccupations constantes concernant l’histoire de l’art dont il revisite les chefs-d'œuvre d’une manière à la fois originale et récurrente. Interrogeant les éléments constitutifs de l’œuvre, toile, châssis, cadre, chevalet, fragment de sculpture antique, tracé perspectif, l’artiste met à nu les ressorts de l’art dans des installations qui entretiennent un constant dialogue avec l’architecture. Cette démarche analytique le rapproche d’ailleurs des artistes conceptuels. Dans L’Indifférent, de 1988, Paolini met en scène un tableau de Watteau du même nom, daté de 1717 et conservé au Louvre, sous la forme de sa reproduction photographique en couleur, encadrée d’une moulure dorée et posée sur un chevalet. Présenté la tête en bas, le tableau est partiellement dissimulé par des feuilles blanches, puis par un autre chevalet, fixé de manière oblique sur le bord du cadre. Une étoffe précieuse, cape dorée empruntée à un costume de théâtre, est négligemment posée sur ses montants, comme oubliée là par le modèle, « l’indifférent », un jeune homme dansant avec l’insouciance des personnages de fêtes galantes dont Watteau s’était fait une spécialité. D’autres feuilles de dessin vierges sont répandues au sol, comme autant de toiles en devenir, non encore créées. Elles dessinent une perspective et permettent d’inscrire l’installation dans l’espace. Commandée à l’artiste en 1988 à l’occasion de célébrations du Bicentenaire de la Révolution française, cette œuvre complexe met en scène un renversement des valeurs, où L’Indifférent incarne un monde de poésie et de légèreté en passe d’être balayé par le souffle de l’Histoire. L’Indifférent existe en trois versions, exécutées en 1988 pour deux d’entre elles (celle de Grenoble est la seconde) et en 1992 pour la dernière, différant l’une de l’autre par quelques détails (absence de feuilles blanches et du cadre pour l’autre version de 1988, tableau à l’endroit et présence de plexiglas pour la dernière). Le personnage de Watteau figurait déjà dans des œuvres antérieures de Paolini, Les Fausses Confidences, de 1983, et Gli occhi pieni di lacrime, de 1983-1984.
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