Paysans au travail
La Russie connaît au début du XXe siècle une vitalité artistique intense nourrie par les échanges entre Paris et Moscou et la constitution de grandes collections d’art moderne comme celle de Sergueï Chtchoukine, amateur de Matisse et de Gauguin. Natalia Gontcharova figure avec Alexandra Exter, Liubov Popova et Varvara Stepanova au nombre des grandes figures féminines de l’avant-garde russe. Formée à l’École de peinture, de sculpture et d’architecture de Moscou, elle y rencontre en 1900 Michaïl Larionov, son futur compagnon. À l’appel du chorégraphe Diaghilev, directeur des Ballets russes, tous deux présentent leurs peintures au Salon d’Automne à Paris. De retour en Russie, ayant assimilé le cubisme et le futurisme, Gontcharova promeut le néo-primitivisme, courant qui domine l’avant-garde russe jusqu’en 1912. Héritière de l’art de Gauguin et du fauvisme, la peinture néo-primitive puise également ses sources du côté des traditions populaires russes : loubok, icônes, artisanat, jouets et dessins d’enfant. L’œuvre de Gontcharova s’organise alors en séries où les cycles religieux alternent avec les cycles paysans, les Vendanges avec les Moissons. Les compositions se succèdent au rythme de ses séjours hivernaux à Moscou et estivaux à la campagne. Paysans au travail est une œuvre présentée dans la grande exposition de l’association du Valet de Carreau organisée par Larionov et Gontcharova en 1910. Trois figures bleues et stylisées occupent l’espace resserré de la toile et se détachent sur un fond ocre jaune, évoquant ainsi les estampes populaires réalisées à partir de gravures sur bois. Les figures trapues et courbées qui ploient sous leur fardeau disent la dureté des travaux agricoles. La vie paysanne est saisie sur le vif dans cette esquisse brossée avec une grande économie de moyens. Le schématisme et la pureté des couleurs de Paysans au travail, dont Malévitch s’inspirera dans ses œuvres figuratives, témoignent de l’attention portée par l’artiste aux recherches formelles des avant-gardes. En 1913, ayant contribué aux plus grandes manifestations artistiques russes (expositions La Queue de l’Âne, La Toison d’or), Gontcharova connaît la consécration avec la rétrospective qui lui est organisée à Moscou et qui comprend plus de 700 œuvres. La même année, alors qu’elle participe au cabaret futuriste avec Larionov et Maïakovski, le maquillage des visages qu’elle réalise, manifestation d’un primitivisme exacerbé, fait scandale. À partir de 1914, l’artiste se consacre majoritairement à la réalisation de décors de théâtre et s’installe définitivement à Paris en 1917.
Un autre regard
-
Autour du cubisme
L'invention du cubisme par Picasso et Braque entre 1907 et 1914 fut déterminante pour l'évolution de l'art moderne.
Découvrez également...
-
Amulette en forme de faucon
VIIe siècle av. J.-C. - IVe siècle av. J.-C. -
Le 14 juillet 1939
avant 1960 -
Allégorie de l'âge d'Or
XVIIe siècle