Femme nue

Cubain imprégné de culture africaine, Wifredo Lam s’initie à la peinture européenne en Espagne en découvrant les œuvres de Van Gogh, Gauguin, Cézanne et Matisse. Chassé par la guerre d’Espagne en 1937, il se réfugie en France et entre bientôt en contact avec le surréalisme qui le fortifie dans sa quête picturale d’un primitivisme authentique et auquel il sera affilié à partir de 1939. Son inspiration et ses formes plastiques sont une tentative progressive et particulièrement réussie de synthèse entre les apports les plus novateurs de la peinture occidentale et la culture afro-cubaine, réactivée au contact de Picasso dont il découvre la collection d’art africain. La fascination pour les masques nègres, si courante chez les artistes de son temps, se double chez lui d’un intérêt pour leur valeur magique et rituelle. Femme nue de 1939 appartient à une phase relativement précoce de sa carrière, où la figure humaine, souvent isolée et repliée sur elle-même, est l’objet d’une stylisation extrême. Comme dans l’univers cubiste, plusieurs points de vue se combinent afin de nous permettre d’embrasser la scène : si le lit et le haut du corps de la femme sont appréhendés en contre-plongée, ses pieds sont montrés de trois quarts. Quant à son visage, schématisé, il emprunte directement sa forme et sa traduction volumétrique à un type de masque que l’on trouve en Afrique orientale, déjà source d’inspiration pour Picasso dans ses Demoiselles d’Avignon. Dans cette composition presque monochrome où se rencontrent toutes les nuances de vert, le corps est à peine souligné par des tonalités chaudes et claires. Le trait rude et les couleurs froides et austères se conjuguent ici pour exprimer tristesse et isolement. Cet art de bâtir l’espace par la couleur ainsi que la manière d’utiliser les motifs décoratifs ne sont pas sans rappeler le travail de Matisse. À la croisée des deux mondes, Wifredo Lam est encore, dans cette œuvre en pleine évolution, à la recherche d’une expression originale et dégagée des influences fertiles qui l’ont conduit sur la voie de l’exploration.
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