Diane et ses nymphes

Le dessin de Grenoble était conservé avec son
pendant, disparu aujourd’hui, dans la prestigieuse
collection de William Esdaile (1758-
1837) sous le nom du paysagiste flamand Pieter
Rysbrack. L’oeuvre revient en fait à son fils John
Michael, célèbre sculpteur d’origine flamande
actif en Angleterre au XVIIIe siècle. Formé à
Anvers chez Michael van der Voort, Rysbrack,
qui demeure peu connu sur le continent, travaille
dès 1720 à Londres comme sculpteur et
y atteint une grande renommée. Ses portraits
sculptés et ses bustes ainsi que ses oeuvres antiquisantes
font fureur auprès de la noblesse
anglaise. Ses cheminées très variées, décorées
de bas-reliefs, oscillent entre la sobriété palladienne
et le baroque romain. Rysbrack exécute
des monuments funéraires pour Westminster
Abbey et la tombe du premier duc de Marlborough
à la chapelle de Blenheim, en collaboration
avec William Kent. Son chef-d’oeuvre
est un grand Hercule de 1756 acquis par Sir
Richard Hoare (Stourhead, Wiltshire).
Le sculpteur est aussi un dessinateur original,
utilisant une technique facilement reconnaissable.
Préparant ses dessins sur un papier
vergé beige à la plume et à l’encre brune, il
les retravaille ensuite au lavis gris et ocre et
les rehausse de gouache blanche. Certaines
feuilles sont préparatoires à des tombeaux
comme les trois projets dessinés à Plymouth[1],
provenant de l’ancienne collection de son ami,
l’amateur Charles Rogers (1711-1784)[2].
Le dessin de Grenoble, le plus beau dessin de
Rysbrack en France, appartient à un groupe
d’oeuvres que Charles Rogers définit ainsi, dans son livre Prints in Imitation of Drawings
paru à Londres en 1778 : « From time
to time, he would amuse himself with making
high-finished Drawings in an admirable
taste : there are generally of his own invention,
designed with a smart pen, washed with bister
and heightened with white. This Amusement
he continued to the last days of his life and
at his I found him employed when he had
scarcely strength to rise from his chair[3]. »
D’autres dessins du même genre sont passés
en vente ces dernières années, par exemple un
Moïse sauvé des eaux[4] ou encore un Jugement
de Pâris[5]. Il est difficile de les dater et cette
remarque vaut aussi pour la feuille exposée ici.
Notons que de nombreux bas-reliefs de l’artiste
pour des cheminées sont très proches de
ces dessins, au point que l’on aurait pu voir
en Diane et ses nymphes à la chasse une oeuvre
préparatoire pour l’un d’eux. Rysbrack est
aussi connu pour sa très belle collection de
dessins anciens (L. 1912), notamment italiens,
dispersée dans plusieurs ventes après sa mort.
On y trouvait aussi bien des dessins de sa main
que des objets d’art et des sculptures.
[1] Plymouth, The City Museum and Art Gallery.
[2] Voir cat. exp. Londres, 1979, n°41, 58 et 62.
[3] Voir Rogers, 1778, II, p. 228. Traduction française : « De temps en temps, il s’amuse à produire des dessins aboutis d’un goût admirable : ils sont généralement de son invention et sont tracés à la plume, lavés de bistre et rehaussés de blanc. Il s’est adonné à ce passe-temps jusqu’aux derniers jours de sa vie et c’est à cela que je le trouvais occupé quand il avait à peine assez de force pour se lever de son fauteuil. »
[4] Vente Londres, Christie’s, 20 mars 1990, n°98.
[5] Vente Paris, Drouot, 20 novembre 1992, n°9
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