Femme italienne jouant du tambourin

Dominique Louis Ferréol PAPETY
XIXe siècle
60 x 48,3 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Don de M. Léonce Mesnard en 1873

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Originaire de Marseille, Dominique Papety suit un premier enseignement auprès d’Augustin Aubert, dans l’école gratuite de dessin de sa ville natale, avant d’entrer à Paris dans l’atelier de Léon Cogniet. Premier Grand Prix de Rome en 1836, le jeune artiste obtient donc son passeport pour la Ville Éternelle où il reste cinq ans, de 1837 à 1842. La Villa Médicis est alors dirigée par Jean-Dominique Ingres, puis après 1840, par Jean Victor Schnetz. Durant son séjour, il se lie d’amitié avec Hippolyte Flandrin et surtout Ernest Hébert avec qui il partage le goût des scènes de genre italiennes mettant en lumière le peuple de Rome et de ses environs. « Papety […] parcourait les rues de l’Italie et, sans trop sacrifier à la fantaisie, s’ingéniait à copier les personnages de la Nature, les enfants de la Vie, croyant retrouver dans leur physionomie pleine de caractère et dans leurs costumes pittoresques, l’observation d’un Léonard de Vinci ou la palette d’un Titien » nous rapporte son biographe Ferdinand Servian[1]. L’artiste profite en effet de son séjour pour sillonner la Péninsule qu’il parcourt principalement à pied, explorant le Latium et poussant jusqu’à Florence, Venise, Padoue et Naples : « Motifs d’architecture, pifferari originaux, lazzaroni aux accoutrements hétérogènes, pêcheurs, chanteuses de rues, pochades enlevées à la diable sous la pression de l’actualité fugitive, esquisses prestement lavées, tout sollicitait son crayon et son pinceau[2]». Papety, dessinateur infatigable, se fait dès lors une véritable spécialité des figures de paysannes italiennes en costume traditionnel , qu’il rehausse délicatement d’aquarelle et de gouache. Cette figure de_ Femme italienne jouant du tambourin_, de grand format et traitée uniquement à la pierre noire grasse, à peine éclairée de quelques touches de gouache blanche, fait d’ailleurs figure d’exception dans une abondante production de petites feuilles aux coloris vifs. Car s’il consacre quelques tableaux à des figures d’Italiennes[3], Papety a surtout traité ce sujet dans le dessin. Cette jeune femme, aux profonds yeux noirs tournés vers le spectateur et aux traits arrondis – plus proche de l’archétype que du portrait individualisé –, est vêtue du costume typique de la région d’Alvito, près de Frosinone, dans le Latium. Elle porte le panno (en dialecte, mantille), la coiffe plate faite d’une étoffe blanche, dont la forme comme le coloris varient selon les différentes régions d’Italie. Ses cheveux d’un noir d’ébène sont coiffés en bandeaux plats ramenés en chignon sur l’arrière. Elle arbore aussi une camicia, la grande chemise blanche, ici rayée, à larges manches bouffantes. Son tambourin la désigne comme une musicienne[4]. Le visage du modèle n’est pas sans rappeler ceux des Deux femmes italiennes (MG 620), étude peinte de petit format donnée par Léonce Menard en 1874 au musée de Grenoble[5]. Absente du catalogue raisonné, établi par François-Xavier Amprimoz dans la thèse de doctorat qu’il a consacrée au peintre en 1980, cette feuille imposante fait partie des rares exemples cités par Ferdinand Servian en 1912 pour donner un aperçu significatif de l’œuvre dessiné de Papety : « Il faut mentionner un beau crayon noir, ' Femme jouant du tambourin', donnée en 1873 par MM. Mesnard et envoyé à l’Exposition Universelle de 1900[6]». Comme nous le confirme le rapport d’activité rédigé par le conservateur Jules Bernard en 1900, ce dessin fait partie des quinze œuvres (peintures, aquarelles et dessins), demandées par l’État au musée de Grenoble pour figurer à l’Exposition centennale.


[1] Ferdinand Servian, Papety, d’après sa correspondance, ses œuvres et les mœurs de son temps, Marseille, 1912, p. 12.
[2] Ibid., p. 15.
[3] Voir_ Types italiens_ au musée des beaux-arts de Marseille ou Sérénade à la Madone _(Nantes, musée des beaux-arts). On compte aussi des portraits comme Femmes italiennes_ (Aix-en-Provence, musée Granet) ou Jeune Italienne (Marseille, musée des beaux-arts).
[4] Papety a traité au moins à deux autres reprises le sujet de l’Italienne au tambourin dans des petites huiles sur toile (ventes du 20 juin 2012 et du 17 avril 2016), mais le costume des modèles évoque plus une bohémienne qu’une paysanne du Latium. Léopold Robert en 1824 est un des premiers, avec sa Jeune fille de Sorrente avec un tambourin (Neuchâtel, musée d’art et d’histoire), à avoir proposé une version du thème, repris plus tard par William Bouguereau dans son_ Italienne au tambourin_ de 1869 (collection particulière).
[5] MG 620.
[6] Ferdinand Servian, op. cit., p. 34.

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