Fête champêtre

Hendrick POTUYL
vers 1640
24,9 x 32,7 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Don de Jean Marie Léonce Mesnard en 1873

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Publié dès 1874 dans le catalogue du musée de Grenoble comme « inconnu de l’école flamande », puis correctement attribué à l’artiste en 1878, bien que par erreur les auteurs aient continué jusqu’en 1913 à le cataloguer à Grenoble comme « Inconnu, école flamande », ce dessin a pu être examiné sur place par l’historien de l’art Cornelis Hofstede de Groot, comme celui-ci l’indique dans son fameux fichier conservé au centre de recherche artistique de La Haye[1].
La vie de Potuyl est encore aujourd’hui inconnue et les premiers biographes, notamment Arnold Houbraken, ne le mentionnent pas. Il est possible qu’il s’agisse d’un artiste amateur qui exploite avec succès un sujet très populaire en Hollande au milieu du XVIIe siècle. Pourtant, sa production dédiée à la vie des paysans figure dès cette époque dans les inventaires hollandais de la riche bourgeoisie d’Amsterdam, comme nous l’indique l’étude d’Abraham Bredius[2]. Heureusement, Potuyl signe souvent ses dessins. D’après les oeuvres datées connues, l’artiste travaille sans doute à Amsterdam entre 1639 et 1650.
On connaît aussi de sa main quelques peintures d’intérieurs rustiques. Dans ces oeuvres, les paysans et les natures mortes rappellent curieusement certains peintres de l’école de Rotterdam comme Hendrick Sorgh[3]. Une Foire de village[4] et une Nativité[5], toutes deux signées, représentent d’autres sujets abordés par l’artiste.
C’est par ses dessins, illustrant des amusements de paysans, que l’artiste demeure le plus connu aujourd’hui. Exécutées au graphite, comme à Grenoble, ou à la pierre noire, ces feuilles utilisent comme support le parchemin, ce qui leur confère un caractère précieux. Cette Fête champêtre aux traits fluides et sinueux possède une vivacité propre à l’artiste. Un cavalier presque trop élégant, une paysanne sur ses genoux, jouit de la vie lors d’une fête paysanne. Son chien, symbole de la fidélité, s’est endormi derrière lui alors que la fête bat son plein. À gauche, des hommes chantent, boivent et fument ; dans l’arrière-plan à droite, un violoniste anime la danse. Grâce au costume de l’homme, notamment sa collerette, il est possible de dater cette feuille du début des années 1640. Il existe d’autres dessins stylistiquement comparables. : une feuille, Paysans assis devant une taverne, a été vendue chez Sotheby’s à Amsterdam, le 16 novembre 2005[6], une Taverne avec des paysans a disparu au Kupferstichkabinett de Dresde en 1945[7] et une Danse des paysans est conservée à la Kunsthalle à Hambourg[8].
D’autres artistes ont été rapprochés de Potuyl, en premier lieu les Amstellodamois Pieter Quast, Guillam de Heer ou encore Cornelis Moninckx actifs à La Haye[9], tous des dessinateurs de scènes de genre paysannes sur parchemin à la manière de Brouwer ou Ostade et de leur école (Bega, Dusart). Travaillant pour des citadins qui se délectent de scènes tirées de la vie rustique, ces trois artistes ne se départent jamais d’une certaine décence. Avec Potuyl, ils ont en commun l’observation aiguë des scènes populaires, le juste maniement de la pierre noire ou du graphite et le sens de l’humour, avec un arrière-plan souvent moralisateur. Leurs dessins, à l’instar de cette Fête champêtre, connaissent un grand succès à la fin du XVIIe siècle, au point que ce genre de scène devient à cette époque un signe distinctif de l’art hollandais. Ainsi, ces oeuvres seront très rapidement recherchées sur tout le continent.


[1] Le Rijksbureau voor Kunsthistorische Documentatie (RKD) à La Haye conserve ce dépouillement des catalogues de vente (fin du XVIIe siècle – milieu du XXe siècle environ) pour tous les artistes néerlandais. La mise en ligne de ces fichiers (« RKDexcerpts ») présente, à notre avis, une des avancées les plus considérables des dernières années dans le domaine de la recherche sur les artistes du Nord.
[2] Bredius, Künstler-Inventare, La Haye, 1915-1922, 8 volumes.
[3] Voir le tableau de Potuyl, Intérieur d’une grange, daté de 1639, conservé aux musées royaux des beaux-arts de Belgique à Bruxelles, Inv. n°2880.
[4] Vente hôtel Drouot, Paris, 28 mai 1971, n°178, repr.
[5] Vente Sotheby’s, Londres, 27 mars 1968, n°13, repr.
[6] Voir vente Sotheby’s, Amsterdam, 16 novembre 2005, n°47, repr.
[7] Voir Dittrich, 1987, n°934.
[8] Voir Stefes, 2011, n°826.
[9] Voir pour ces trois artistes Bol, Butôt et Keyes, 1981, n° 105-107.

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