Note su un ritratto militare

Valerio ADAMI
1972
129,7 x 97 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Achat à la Galerie Maeght en 1972

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[Catalogue de l'exposition Italia moderna. La collection d'art moderne et contemporain italien du musée de Grenoble, 19 mai-4 juillet 2021]

Né à Bologne en 1935, installé à Paris en 1970, peintre de la vie contemporaine et « dessinateur-peintre » comme il se définit lui-même, Valerio Adami est une personnalité singulière difficilement identifiable à un mouvement. Élève de l’Académie des Beaux-Arts de Brera à Milan, il est d’abord marqué par le travail de Roberto Matta et par le surréalisme, influences originelles qui continueront d’inerver une oeuvre tout entière dévolue à la mise au jour des structures de la pensée moderne. On reconnaît aisément le style de ses toiles figuratives, généralement inspirées de thèmes philosophiques ou littéraires. Tant marqué par l’expressionnisme, le pop art, la bande dessinée que par les maîtres de la Renaissance italienne (Uccello, Piero della Francesca ou Raphaël), Adami nourrit une réflexion intellectuelle ininterrompue sur son art en lien avec des écrivains et philosophes comme Jacques Derrida ou Daniel Arasse. C’est vers 1965 que l’artiste se forge un style personnel, entre autres marqué par les photographies qu’il trouve dans des revues ou des publicités. Il dit adopter un « style totalement mental ». Et son travail de la libre association est, avant toute chose, fondé sur le dessin. Dès lors, la couleur uniforme et pure, appliquée en aplats, l’absence d’effets de matière, la ligne ainsi que les formes forcloses deviennent la véritable estampille du peintre, lui permettant de dire la réalité banale et souvent sordide de la civilisation urbaine. Ainsi, Valerio Adami se fait, selon Jacques Dupin, le « cartographe des cataclysmes quotidiens ».

Note su un rittrato militare [Notes pour un portrait militaire] (1972) figure à mi-corps un énigmatique personnage. Ici, encore, « la figure humaine est disloquée, fragmentée, sans visage » (J. Dupin). La structure de l’image est feuilletée, les motifs sont dispersés et tronqués, l’harmonie impossible à réaliser. Intimidant, le visage coiffé d’une casquette, probablement celui d’un général emprunté à la presse de l’époque, est des plus mystérieux. La veste rouge, le couvre-chef mauve comme l’absence d’expression rattachent cet étrange effigie militaire au domaine de la bande dessinée. À travers des « tableaux énigmes » comme celui-ci, fragments d’images évoquant la structure des puzzles, Adami joue aussi avec la perception du spectateur. Il cherche, par là-même, à stimuler la réflexion. « Le tableau est le vas hermeticum des alchimistes, le lieu de la transmutation ; d’ailleurs les stoïciens identifiaient Hermès au logos. […] Oui, le rôle de la peinture est aussi de faire penser les gens. » À travers sa création, toujours à mi-chemin entre l’écriture et le dessin, l’artiste vit littéralement, qui plus est, une quête sinon spirituelle, à tout le moins personnelle et existentielle. « Quand je commence à dessiner, il y a une forme qui passe par le crayon, par la main, par le bras, qui arrive au coeur, va à la tête et repart dans l’autre sens. Je dis souvent qu’avec ce geste répétitif, [...] dessiner est l’équivalent de la prière » (Adami, 1980).

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