Roger délivrant Angélique
En 1855, Delacroix est un artiste confirmé. Une salle entière lui est dédiée à l’Exposition universelle où la France tient par ses grands talents à s’affirmer comme la patrie des arts. Pour l’occasion, le peintre reçoit de l’État la commande d’une œuvre et se livre à une variation sur la célèbre Chasse au Lion de Rubens. L’artiste décline le sujet dans plusieurs toiles au point, dans ces années 1850, de faire du rapt, de la violence des rapports entre hommes et femmes ou de la lutte entre hommes et animaux, des leitmotivs de son œuvre. Formé dans l’atelier de Pierre-Narcisse Guérin où il fait la connaissance de Bonington et de Géricault, Delacroix, reconnu comme le chef de file du romantisme au Salon de 1822 avec La Barque de Dante, a puisé son inspiration autant chez les maîtres italiens que du côté de la peinture flamande et des œuvres atmosphériques de Constable. Dans ses dernières années, ce sont avant tout Titien et Rubens qui lui servent de mentors. D’abord identifié à un saint Georges, la peinture de Grenoble a été assimilée à un épisode du Roland Furieux (1502) de l’Arioste, poète italien de la Renaissance (Chant X, 92-101). La scène se passe sur les côtes accidentées de l’Irlande. Roger chevauchant un cheval vient au secours de la belle Angélique, captive et à demi-nue, en transperçant le monstre marin qui la menace. La manière esquissée tout comme les touches virevoltantes, preuves de la rapidité d’exécution, font écho aux flots déchaînés que Delacroix a longuement observés à Dieppe. Malade, assombri par la vieillesse mais soucieux d’assurer son immortalité à travers son œuvre, l’artiste reprend dans cette composition certains de ses motifs privilégiés tels que La Chasse au tigre ou Andromède. La peinture est une réplique de l’œuvre du musée du Louvre, Saint Georges délivrant le dragon ou Persée délivrant Andromède (1847). Ingres avait traité le thème dans un tableau de 1819 qui fut accroché au musée du Luxembourg et que Delacroix eut le loisir d’observer.
Un autre regard
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La peinture d'histoire au XIXe siècle
Le XIXe est le siècle des paradoxes où se côtoient les tendances les plus novatrices et les retours permanents vers les formes du passé, où s’exprime la nostalgie de l’Antiquité, du Moyen Âge et de la Renaissance parfois de manière réaliste, précise et appliquée.
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