Les Odalisques
Née à Quaix-en-Chartreuse, non loin de
Grenoble, Marie Vallet, après une brève intrusion
dans le monde de l’enseignement comme
institutrice, puis dans celui de la couture –
elle fut giletière – s’installe à Paris en 1895.
Elle se lie à Jules Flandrin et apprend à peindre
à ses côtés et dans l’environnement de ses
amis Matisse, Marquet, Rouault…, tous logés
dans le même immeuble. Elle commence à
exposer autour de 1900 et prend comme pseudonyme
Jacqueline Marval en assemblant
les premières syllabes de son prénom et de
son nom. En 1901, elle présente dix tableaux
au Salon des indépendants, tous acquis par
Ambroise Vollard, le célèbre marchand. Sa
carrière est lancée. Avec Jules Flandrin, c’est
elle qui introduira Andry-Farcy, le fameux
conservateur du musée de Grenoble à partir
de 1919, auprès de Picasso et de Matisse
notamment, lui permettant ainsi d’obtenir
de ces artistes des dons remarquables pour
la collection d’art moderne naissante.
Autodidacte, Jacqueline Marval, s’est rapidement
forgé un style, caractérisé par un
dessin ample et souple, souvent allusif et ne
s’embarrassant pas de détails, et un coloris
qui ne sera jamais aussi virulent que celui des
Fauves, préférant aux tons purs des accords
plus nuancés, voire acidulés. Enfin ses sujets
de prédilections vont vers l’univers féminin
qu’elle aime mettre en scène, les enfants et
les fleurs « qu’elle a toutes peintes ».
Les Odalisques, que l’artiste présente au Salon
des indépendants en 1909, peuvent légitimement
être considérées comme son chef-d’oeuvre.
Elle le conservera toute sa vie et
l’exposera régulièrement en s’attirant à chaque
fois des critiques élogieuses. Composé de
cinq figures féminines, reproduites grandeur
nature, le tableau reprend le thème des femmes
au bain qu’Ingres avait magnifié à partir de ses odalisques jusqu’au Bain turc, et dont les
peintres orientalistes feront un passage obligé.
Ce qui frappe néanmoins, dans l’approche
de Jacqueline Marval, c’est son naturalisme
associé à une forme de majesté classique. Les
nus ici n’ont rien de flatteur ni d’aguicheur,
mais apparaissent dans leur éclat marmoréen
avec simplicité et naturel. Ils se déploient en
frise sur l’ensemble du tableau dont le fond
est animé par le drapé azur d’un rideau s’ouvrant
sur un corridor adjacent. Assises à même
le sol, à l’orientale, quatre femmes partagent
une collation qu’une servante apporte sur
un plateau. Toutes sont enturbannées et
composent par leur beau hiératisme et leur
regard fardé, une scène à la fois énigmatique
et banale, réaliste et abstraite. Les harmonies
colorées sont admirables, les jaunes et rouges
répondant aux blancs et bleus dans un contrepoint
parfois strident que de larges plages de
lumière viennent adoucir.
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