Troupeau de moutons

Jean-Baptiste MILLET
XIXe siècle
16,4 x 20,8 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Legs Isaure Périer, veuve de M. Aristide Rey, en 1930. Entrée dans les collections en 1931.

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Jean-Baptiste Millet est le frère de Jean-François, de dix-sept ans son cadet, en même temps que son élève. Aucun travail de recherche ne lui a jamais été consacré et s’il apparaît parfois au détour d’une publication, c’est dans l’ombre de son frère aîné, beaucoup plus célèbre, dont il adopte les thèmes et même la manière de dessiner. Jean-Baptiste excelle dans l’aquarelle et le dessin à la plume ou au crayon Conté qui permet des veloutés dans les ombres, mais ne semble pas avoir mis son talent au service de la peinture à l’huile. En revanche, il s’essaye à la gravure sur bois avec succès, réalisant en particulier une très belle planche de la Grande Bergère assise de 1874, d’après son illustre aîné. Julia Cartwright est un des rares auteurs à accorder à Jean-Baptiste une place dans sa biographie de Jean-François[1]. Elle raconte les circonstances qui amènent le jeune homme, à la mort de sa mère, à embrasser la carrière artistique et à rejoindre son aîné à Barbizon pour suivre son enseignement et partager sa maison. Elle souligne que la réputation de Jean-François contribue à lancer sa carrière et que nombre de marchands lui auraient conseillé de faire passer ses propres œuvres pour celles de son frère, ce que Jean-Baptiste aurait refusé. Car leur manière est si proche, à la fois dans les thèmes comme dans le traitement, qu’il est loisible de les confondre sans la présence permanente d’une signature où le second prénom est inscrit lisiblement sous sa forme intégrale ou abrégée en « Bapt. ». Si Jean-Baptiste est présent régulièrement au Salon de 1870 à 1880, c’est dans la section « Dessins » avec des aquarelles dont le répertoire de sujets – La Moisson, La Ferme de Barbizon, Une récolte de noix ou Une laveuse – semble directement emprunté au registre de Jean-François. L’aquarelle du musée de Grenoble – ce troupeau de moutons paissant paisiblement dans un champ dont les pentes se déversent entre deux solides maisons de pierre – est caractéristique de sa manière. Son dessin à la plume structure et bâtit solidement chaque élément. Les touffes d’herbe dont la disposition permet de scander l’espace et de créer la perspective, les silhouettes des moutons, du berger et de son chien, et les deux groupes de maisons qui cadrent la scène, révèlent un métier solide et non le faire d’un simple imitateur. L’originalité de l’artiste par rapport à son frère se lit surtout dans le choix des cadrages originaux, presque japonisants, et une manière de traiter l’aquarelle qui lui est propre. Par l’ajout de gomme arabique, Jean-Baptiste Millet donne un fini de porcelaine à sa couleur. Sa palette aux tons clairs, dominée par un camaïeu de verts acides, sa capacité à rendre la transparence du ciel comme la densité des pierres et de la terre, son traitement synthétique des formes, ont sans doute contribué à son association avec la jeune génération des impressionnistes puisqu’il participe à la seconde exposition du groupe en 1876 avec dix aquarelles aux thèmes ruraux. Peu d’œuvres sont conservées dans les collections publiques, à l’exception toutefois du musée Thomas-Henry de Cherbourg qui possède sept dessins de l’artiste.


[1] Julia Cartwright, Jean-François Millet, His Life and Letters, Londres, 1896, p. 143-144.

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