Curius Denatus refusant les présents des ambassadeurs samnites

Agréé à l’Académie avec Marius prisonnier à Minturnes (MG 1368), Peyron est reçu dans l’institution en 1787 avec un sujet imposé, également tiré et de l’histoire romaine : Curius Denatus refusant les présents des ambassadeurs samnites. De cette composition, nous possédons aujourd’hui le tableau définitif, déposé par le Louvre au musée Calvet à Avignon [1] ainsi qu’une esquisse peinte conservée au musée des beaux-arts de Marseille[2].
Le sujet est, comme le morceau d’agrément, emprunté aux ouvrages de Plutarque (Vie de Caton l’Ancien, 2) et de Valère Maxime (IV, 3, 5). Le livret du Salon de 1787, où le tableau est exposé, relate l’histoire en détail : « Marcus Curtius Denatus après avoir été trois fois Consul, et avoir obtenu deux fois les honneurs du triomphe, s’était retiré à la campagne pour se reposer de ses travaux ; les Ambassadeurs Samnites l’y trouvèrent faisant cuire des racines dont un pot de terre ; ils lui offrirent des vases d’or, pour l’engager à prendre leurs intérêts. Le généreux Romain les refusa en disant : je préfère ma vaisselle de terre à vos vases d’or ; je ne veux point être riche, content de la pauvreté de commander ceux qui le sont ». Les épisodes moralisants, tirés de l’histoire romaine, connaissent un succès grandissant à partir des années 1760. Celui que Peyron illustre ici avait également été proposé en 1776 pour le premier Prix de Rome des États de Bourgogne[3] . L’accueil réservé au tableau est mitigé au Salon et les critiques reprochent à Peyron le manque de noblesse dans la présentation du héros[4] .
Envoyé par l'État au musée de Grenoble sous la Révolution, ce grand dessin, très achevé, reproduit avec une grande précision la composition définitive. Figurant parmi les plus importantes feuilles néoclassiques du musée, au côté de la grande frise de David (MG 2615), l’œuvre a malheureusement souffert d’une exposition trop longue qui a fortement jauni le papier.
La précision de l’exécution ainsi que la présentation de la scène comme œuvre autonome, avec le sujet soigneusement inscrit au bas de la feuille, indiquent ici une réplique autographe plutôt qu’un travail préparatoire. Pierre Rosenberg et Hugo van de Sandt, dans la monographie consacrée à l’artiste en 1983, soulignaient la relation entre ce dessin et une œuvre comparable, saisie chez le comte d’Angiviller en 1794. Une lettre autographe de l’artiste, datée du 24 novembre 1786[5] , indique que cette réplique, offerte par Peyron au directeur des Bâtiments, avait été réalisée après la validation par l’Académie de l’esquisse, en octobre 1786, et avant l’exécution du tableau final, présenté en juin de la même année. Le dessin de Grenoble intègre déjà quelques minces changements qui seront apportés dans la version définitive, comme l’ajout du bouclier et du glaive, accrochés à la colonne, et la modification du geste de la jeune femme placée à l’extrême droite.
[1] H/T, H. 117 ; 163. Avignon, musée Calvet (Inv. D 876.1).
[2] H/T, H. 0,73 ; 0,99. Marseille, musée des beaux-arts (Inv. 203).
[3] Voir tableau attribué à Gagnereaux ou Naigeon à Nancy.
[4] Voir les critiques du Salon dans Rosenberg et van de Sandt, 1983, sous n° 112, p. 122-123.
[5] A.N., O1 1919 (3), fol. 327, publié par Rosenberg et van de Sandt, 1983, p. 123 sous n° 113.
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