Projet de peinture décorative pour le vestibule du musée de Grenoble

Alexandre Denuelle est un peintre-décorateur et un architecte, élève de Félix Duban auprès de qui il s’initie à la peinture décorative d’inspiration pompéienne, gothique ou renaissance. Il étudie aussi dans l’atelier de Paul Delaroche, peintre initiateur du genre de « l’anecdote historique » tentant de récréer la vie de personnages historiques dans une veine intimiste. Ses premiers travaux de décoration le conduisent, en compagnie de Duban, à Dampierre, au château du duc de Luynes. Un voyage de trois années en Italie à partir de 1842 lui permet de copier les peintures des villas de Pompéi et d’Herculanum mais aussi de faire des relevés de fresques dans des églises comme celle de San Miniato. À son retour, il entreprend la décoration de l’église de Saint-Germain-des-Prés aux côtés d’Hyppolite Flandrin. En sa qualité d’artiste attaché à la Commission des Monuments Historiques, il accompagne Viollet-le-Duc dans ses principaux voyages. Il est chargé en particulier d’effectuer le relevé des fresques du Palais des Papes à Avignon. Il est appelé en 1868 à Grenoble par l’architecte Charles-Auguste Questel sur le chantier du musée-bibliothèque en cours de construction. Questel le charge de proposer un programme décoratif complet pour habiller l’édifice très moderne pour l’époque, mêlant habilement à l’architecture d’inspiration classique en pierre de taille les dernières innovations en matière de charpente métallique. La question du décor intérieur fait l’objet d’un débat, voire d’un conflit avec la municipalité, qui souhaite voir confier ces travaux à des artistes locaux, Diodore Rahoult et Henri Blanc-Fontaine, tous deux élèves de Léon Cogniet. Questel finit par avoir gain de cause et impose Alexandre Denuelle pour l’ensemble du programme décoratif, à l’exception des allégories figurant le « Musée » et la « Bibliothèque » dans le vestibule et ainsi que les quatorze figures qui ornent le mur supérieur de la bibliothèque. Le dessin acheté par les Amis du musée représente le projet de décoration murale des deux premières travées du vestibule du musée de Grenoble, dans lequel Denuelle a figuré le tympan historié surmontant l’entrée de la bibliothèque, tympan confié à Diodore Rahoult et intitulé L’Histoire naturelle, la Poésie, la Science , dont le musée possède le calque définitif au pastel. Le parti décoratif de Denuelle s’inspire ici clairement des villas pompéiennes, avec ses murs rouges brun, délimités horizontalement par des assises de pierres blanches et surtout son plafond orné de rinceaux. Le seul autre dessin de Denuelle conservé pour ce décor est actuellement dans les collections de l’École nationale supérieure des beaux-arts à Paris. Il s’agit une étude pour le décor de rinceaux du plafond du vestibule qui prend place exactement au-dessus de cette vue. À la fois artistique et technique, cette planche dessinée montre avec quel degré de précision Denuelle conçoit l’espace du vestibule, figurant même la place des piédouches surmontés de sculptures ainsi que la grande statue ornant la niche centrale. Si le décor pompéien de l’ancien musée de Grenoble est toujours en place, il ne reste que ces deux feuilles pour attester du travail du décorateur Alexandre Denuelle dans cet édifice. Ce dessin exceptionnel vient compléter, dans les collections du musée, les grandes aquarelles de l’architecte Charles-Auguste Questel (façade en couleur du musée-bibliothèque mais aussi de la préfecture ) et les nombreux dessins préparatoires de Diodore Rahoult et Henri Blanc-Fontaine pour les décors des tympans du vestibule et pour les quatorze allégories de la bibliothèque.