La sculpture au XIXe siècle

La fin du XVIIIe siècle, en particulier suite aux fouilles d’Herculanum et de Pompéi, voit chez de nombreux artistes un regain d'intérêt pour les modèles grecs et romains.

On redécouvre l'Antiquité que l'on idéalise et dans laquelle on puise des modèles utopiques.

Au cours du XIXe siècle, les nouveaux courants stylistiques qui évoluent parallèlement (symbolisme, romantisme et réalisme) s’affirment en s’opposant à la sculpture classique.  Le goût pour la violence et le drame s'exacerbe. Les sources littéraires et historiques sont à l'origine de sujets nouveaux s'attachant à reproduire les infinies variations de l'âme.

La sculpture comme art public connaît à cette époque un développement sans précédent. Les villes en transformation se couvrent d’allégories politiques ou de portraits à la gloire des grands hommes. L'exécution de sculptures en matériaux nobles et denses est très onéreuse. Aussi, à partir d'un modèle en plâtre, la réalisation finale de l'œuvre dépend-elle essentiellement de l'accord passé avec un commanditaire.

Le souci de référence au réel offre une grande variété dans les thèmes abordés et dans les matériaux utilisés. Les sculptures monumentales en pierre, comme les bronzes de petites dimensions fondus à partir de modèles en argile et réalisés en de multiples exemplaires, participent de l'épanouissement de la nouvelle sculpture.

La collection du musée de Grenoble présente un bel ensemble assez représentatif des tendances en France au XIXe siècle.

  • Champollion

    Médium :
    Auteur : Frédéric-Auguste BARTHOLDI
    Date : 1867
    Dimension : 200 x 70 x 70 cm
    Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
    Acquisition : Don de Mme Bartholdi en 1905

    Détails

    Illustre créateur de la statue de La Liberté éclairant le monde installée à New York en 1886, Bartholdi a profondément marqué l’art de la sculpture monumentale.

    Son Champollion se tient debout, pied gauche posé sur une tête colossale de pharaon, menton appuyé sur la main gauche, main droite tenant des rouleaux de papyrus sur la jambe repliée. Le regard lointain, il paraît plongé dans une profonde réflexion. Jusque-là les portraits de Champollion le montraient en conservateur du Louvre ou en aventurier habillé d’un costume égyptien. Ici le sculpteur opère la synthèse : vêtu d’une redingote, il porte, jeté sur l’épaule, le burnous arabe qui tombe jusqu’à ses pieds en un drapé élégant. Les volumes s’articulent en un subtil équilibre qui confère au personnage une dimension héroïque.

  • Le Triomphe de la Révolution

    Médium :
    Auteur : Jean-Alexandre-Joseph FALGUIÈRE
    Date : XIXe siècle
    Dimension : 97 x 130 x 99 cm
    Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
    Acquisition : Don de Léon de Beylié en 1903
    Localisation : SA17 - Salle 17

    Détails

    Cette maquette en cire est le seul témoignage sculpté du projet de Falguière pour le couronnement de l’Arc de l’Étoile à Paris. Présentée au Salon de 1882, elle est réalisée dans une cire vert foncé imitant le bronze, modelée et appliquée sur une armature interne. La France personnifiée trône sur le char de la République, brandissant d’une main le drapeau, de l’autre la Déclaration des Droits de l’homme. Les quatre chevaux piétinant les figures de l’Anarchie et du Despotisme sont guidés par la Justice et la Liberté. À l’arrière, un ouvrier quittant sa famille et un soldat blessé, soutenu par un frère d’arme, sont des allusions à l’héroïsme pendant la guerre de 1870. Falguière insuffle à l’ensemble un mouvement énergique qui inscrit l’œuvre dans la tradition des grands quadriges triomphaux de la Troisième République.

  • Phryné

    Médium :
    Auteur : James PRADIER (Jean-Jacques PRADIER, dit)
    Date : 1845
    Dimension : 183 x 40 x 47 cm
    Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
    Acquisition : Legs de Jules Monnet-Daiguenoire en 1903
    Localisation : SA18 - Salle 18

    Détails

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    Pradier appartient une génération de sculpteurs influencés par l’hellénisme et fascinés par les récentes découvertes telles la Vénus de Milo ou les marbres du Parthénon.

    Cette figure de femme est le parfait exemple du «beau idéal» néo-classique. Courtisane d’Athènes, maîtresse et modèle de Praxitèle, un sculpteur grec renommé, Phryné est accusée d’impiété. Dénudée devant les juges de l’Aréopage par son défenseur, elle est acquittée en raison de sa beauté. Pradier, en digne héritier de Praxitèle, l’a sculptée dans une colonne de marbre de Paros qu’il rehausse d’or et de couleurs dont il reste quelques traces. Le geste suspendu, la tête inclinée et le léger contrapposto prêtent à Phryné une réserve et une grâce qui instillent le doute : est-elle en train de se couvrir ou de se dévoiler ?

  • La Mort de Lucrèce

    Médium :
    Auteur : Victor SAPPEY
    Date : 1828
    Dimension : 159 x 217 x 30 cm
    Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
    Acquisition : Don de l'artiste en 1834
    Localisation : SA18 - Salle 18

    Détails

    Formé à Paris et considéré en son temps comme l’un des meilleurs sculpteurs du Dauphiné, Sappey se voit confier la création et la direction de l’école de sculpture architecturale de Grenoble en 1831.

    La mort de Lucrèce (509 avant J-C) est, selon Tite-Live, l’acte fondateur de la République Romaine. Dans cet épisode tragique, Lucrèce vient de se donner la mort après avoir été déshonorée par le fils du roi de Rome. Avant de trépasser, elle a fait promettre à sa famille de la venger. La tension dramatique de la scène s’exprime dans l’opposition de deux groupes distincts : l’un composé de Lucrèce et de son père éploré, l’autre des trois hommes parmi lesquels son époux à gauche.

    À l’arrière-plan, la louve allaitant Remus et Romulus clôt cette composition d’inspiration néoclassique.

  • La Comédie

    Médium :
    Auteur : Victor Edmond LEHARIVEL-DUROCHER
    Date : 1861
    Dimension : 128 x 75 x 85 cm
    Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
    Acquisition : Dépôt de l'Etat en 1888
    Localisation : SA18 - Salle 18

    Détails

    Quand La Comédie entre dans la collection grenobloise, l’architecte du musée André Questel prévoyait de la présenter dans le vestibule.

    La perception de la sculpture varie selon l’angle de vue : le visage serein de la femme est en partie caché par un masque aux traits ironiques. La beauté classique et idéale côtoie un physique brutal et inquiétant. Cette dualité du caractère humain illustre la complexité du jeu de Thalie, muse de la Comédie, et renforce l’idée selon laquelle sous le masque peut se dissimuler une réalité fort différente. Donnant à découvrir successivement deux visages, l’artiste confère à son allégorie des caractéristiques humaines qui, au-delà du seul art théâtral, illustrent l’existence et interrogent l’être et le paraître.

  • Le Troisième enfant du groupe d'Ugolin

    Médium :
    Auteur : Jean-Baptiste CARPEAUX
    Date : vers 1861
    Dimension : 130 x 31,5 x 29 cm
    Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
    Acquisition : Don de Louise Clément-Carpeaux en 1940

    Détails

    Carpeaux entame un groupe de cinq personnages, Ugolin et ses enfants pour son travail de dernière année à l’Académie de France à Rome en 1857. Il s’inspire de L’Enfer de Dante, dans lequel le comte Ugolin, tyran de Pise, emprisonné dans la Tour de la Faim, meurt après avoir mangé les cadavres de ses enfants et petits-enfants. Carpeaux présente Ugolin assis sur un rocher, se mordant les doigts d’angoisse, avec, à ses pieds, sa progéniture à l’agonie.

    Ces tirages destinés au commerce, comportent des clés de montage en plâtre qui témoignent des repères du modèle original servant à fondre le groupe sculpté. Le bronze, fondu en 1863, est conservé au musée d’Orsay.

  • Les premières fleurs

    Médium :
    Auteur : Urbain BASSET
    Date : 1880
    Dimension : 141 x 42 x 36 cm
    Acquisition : Achat à l'artiste en 1880
    Localisation : SA19 - Salle 19

    Détails

    Né à Grenoble, Urbain Basset participe aux salons de sa ville natale, partagé entre sa carrière parisienne et ses attaches berninoises.

    Ce bronze à été acquis par le musée en 1880 tandis que le marbre définitif a été déposé à l'Ambassade de France à Rome.

    De taille moyenne et les bras levés, l'enfant tient une fleur de lotus qu'elle semble vouloir fixer dans ses cheveux. Coiffée à la mode égyptienne, cette fillette n'est plus une enfant ni tout à fait une adolescente bien que l’œuvre ait eu pour titre Cléopâtre adolescente. Les yeux sont traités à la façon des statues égyptiennes, prunelles noires et fixes sur un fond de céramique blanc. Le geste naturel des bras engendre une cambrure marquée sans provoquer une quelconque sensualité dans ce corps encore très proche de l'enfance.

  • Ecce Homo

    Médium :
    Auteur : Henri DING
    Date : 1878
    Dimension : 140 x 60 x 100 cm
    Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
    Acquisition : Don de la Société des amis des arts en 1880
    Localisation : SA19 - Salle 19

    Détails

    Sculpteur né à Grenoble, Henri Ding présente cette statue en plâtre de grand format au Salon parisien en 1878. Jugée trop réaliste par le jury elle sera mieux reçue au Salon grenoblois deux ans plus tard. Jésus couronné d’épines, les mains liées, assis sur un bloc de pierre où son manteau est tombé, en est le sujet. Le plâtre, réalisé à taille réelle, laisse davantage apparaître le geste de l’artiste que le marbre. Il en accentue les moindres détails naturalistes, renforçant ainsi la part d’humanité du Christ.

    Toute la douleur et la tristesse de l’homme incarnées par le relâchement du corps étaient sans nul doute le propos de l’artiste.

  • Berlioz mourant

    Médium :
    Auteur : Joseph Pierre RAMBAUD
    Date : 1893
    Dimension : 144 x 77 x 128 cm
    Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
    Acquisition : Don Mme Rambaud (veuve de l'artiste) en 1896
    Localisation : SA19 - Salle 19

    Détails

    Pierre Rambaud, sculpteur formé à l’école des beaux-arts de Paris, réalise ce Berlioz mourant vingt-quatre ans après la mort du musicien, en dehors de tout contexte commémoratif. Il choisit de représenter le compositeur rendant son dernier souffle, assis dans un fauteuil, la chemise entrouverte laissant voir son corps décharné.

    La monumentalité de ce marbre en accentue le caractère poignant, presque dérangeant tant la représentation est réaliste et morbide. La lyre, les partitions et l’inscription Non omnis moriar [Tout ne meurt pas] aux pieds du compositeur nous rappellent que la disparition du corps physique n’est rien au regard des œuvres qui demeurent pour l’éternité et font entrer Berlioz au panthéon des créateurs.

  • Main d'un bourgeois de Calais

    Médium :
    Auteur : Auguste RODIN
    Date : 1901
    Dimension : 17 x 6 x 8 cm
    Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
    Acquisition : Don de Léon de Beylié en 1901
    Localisation : SA23 - Salle 23

    Détails

    L’attention de Rodin s’est portée très tôt sur les mains et les têtes qu’il travaille de façon autonome. Il sculptera plus d’un millier de mains dont celle « d’un bourgeois de Calais » présentée ici. Créée pour le monument évoquant le sacrifice de six citoyens de Calais, en 1347, pour sauver leur ville de l’emprise du roi d’Angleterre, cette main anatomiquement parfaite a été modelée pour deux figures. Levée vers le ciel en signe d’abnégation pour l’un des personnages, elle est aussi utilisée dans une variation qui traduit le doute d’un autre. La notion de « corps en morceaux » était selon Rodin indispensable à la bonne connaissance du corps humain. Réalisée en terre cuite, cette ébauche est investie d’une expressivité puissante que la force du modelé et la dynamique du mouvement viennent souligner de façon magistrale.