Berger dans un paysage
Berger dans un paysage est le second dessin
d’Abraham Bloemaert dans la collection de
Grenoble. Contrairement à la Vue d’une ferme
(MG D 670), il est resté inédit alors qu’il figure dans
les collections sous sa bonne attribution. Il fait
partie des dernières oeuvres de Bloemaert, alors
âgé de plus de quatre-vingts ans. Toute une
série de dessins de cette période représente des
paysages variés, s’ouvrant parfois sur un lointain
peuplé de quelques personnages. Le format
de ces feuilles est presque toujours le même,
soit 16 cm sur 24 cm. Au sein de cette trentaine
d’oeuvres conservées, les techniques peuvent
considérablement varier : Bloemaert utilise parfois
la plume et le lavis et, à d’autres reprises, des
encres colorées, rehaussées de blanc.
Au cours de sa carrière, Abraham Bloemaert
délaisse progressivement la peinture maniériste
pour livrer des compositions plus équilibrées
et monumentales, éclairées d’une
lumière sereine et uniforme. Durant ses dernières
années, l’artiste abandonne progressivement
la peinture en faveur du dessin. Bolten
parle, à propos des oeuvres de cette dernière
période, de « picture drawings », exécutés vers
1650 à la pierre noire et généreusement lavés
d’encre brune et grise[1]. Malheureusement,
ces dessins n’ont pas été pris en compte par la
toute récente exposition monographique sur
l’artiste de 2011-2012 qui a eu lieu à Utrecht et
à Schwerin[2]. Le dessin de Grenoble montre un
arbre noueux à deux troncs sur une dune, au centre de la composition, alors qu’au premier
plan un berger tient un bâton, le bras droit
tendu en avant. Un coucher ou lever du soleil
anime le vaste paysage. C’est l’atmosphère qui
prime ici, le sentiment de la nature.
Ce dessin est proche de deux autres paysages,
le premier avec un vieux berger au centre,
conservé à la Staatliche Graphische Sammlung
à Munich (Inv. 19511 Z)[3] et le second à la National
Gallery of Scotland à Édimbourg (Inv. D 1320)[4].
Ces deux feuilles, exécutées à la même période,
montrent une touche semblable et une même
utilisation du lavis pour suggérer les effets
atmosphériques.
On constate qu’une grande partie de ces paysages
tardifs de Bloemaert était, dans la première
moitié du XVIIIe siècle, dans des collections
françaises. La feuille de Grenoble est
demeurée en France alors que la majorité de
ces dessins se retrouve aujourd’hui à l’étranger.
Cette oeuvre est le témoignage émouvant de la
pratique d’un artiste âgé, travaillant encore au
milieu du XVIIe siècle, qui a pu renouveler son
art en se montrant sensible aux effets atmosphériques
et au réalisme d’artistes plus jeunes
que lui tels Jan van Goyen, Pieter Molyn ou
encore Salomon van Ruisdael.
[1] Bolten, 2007, nos 1628-1664 et p. 488-489.
[2] Voir cat. exp. Utrecht-Schwerin, 2011-2012.
[3] Bolten, 2007, I, no 1645, repr. et voir Wegner, 1973, no 244, repr. pl. 100.
[4] Bolten, 2007, I, no 1652, repr. et voir Andrews, 1985, I, p. 7, no D 1320, repr. ; annoté Bloemaert en bas à gauche.
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