Personnages dans des ruines

Des promeneurs, voire des touristes, visitent
les ruines d’un château. L’un d’entre eux s’est
même allongé sur la crête d’un mur, dans
une position qui rappelle celle du Gaulois
mourant, la fameuse sculpture du Capitole.
À droite, une bergère apparaît sous le porche
de la forteresse.
Le dessin est conservé à Grenoble sous une
attribution à Juan Montero de Rojas, caravagesque
espagnol dont le nom était inscrit
sur l’ancien montage du dessin, perdu
aujourd’hui. L’inscription apposée au premier
plan à droite de la feuille a amené Mesnard
à l’attribuer à cet artiste espagnol : mais une
confrontation avec les quelques oeuvres de cet
artiste qui nous sont aujourd’hui connues ne
permet aucunement d’y reconnaître sa main.
Cette oeuvre, évoquant davantage l’art de Cornelis
van Poelenburgh (MG D 695) ou d’Herman
van Swanevelt (MG D 709 et MG D 1784), s’intègre mieux
dans l’ensemble des dessins nordiques italianisants.
Il semble, à notre avis, revenir plutôt
à Dietrich, artiste saxon qui a travaillé, entre
autres, dans le goût des Hollandais italianisants
(voir MG D 1473). Le Wallraf-Richartz Museum à
Cologne conserve un dessin de ruines attribué
à cet artiste et très proche de celui étudié ici[1].
Les personnages, surtout, et leurs costumes,
ainsi que la manière de dessiner les arcs par de
petits traits parallèles et concentriques invitent
à la comparaison et mettent en doute la traditionnelle
datation de cette feuille au XVIIe siècle.
Il existe aussi de nombreuses gravures d’après
Dietrich représentant des ruines et des personnages
similaires. Toutes ces oeuvres, datées,
montrent que l’artiste les a dessinées longtemps
après son retour d’Italie en 1744. Lors de ses
promenades autour de Dresde, il a pu s’inspirer
et rafraîchir sa mémoire par la vue des nombreuses
ruines de châteaux longeant l’Elbe.
Dietrich n’a d’ailleurs pas uniquement marqué
la peinture en Saxe dans la seconde partie
du XVIIIe siècle : il a approfondi l’intérêt pour la
peinture européenne par son rôle d’inspecteur
de la Gemäldegalerie de Dresde. Il dirigeait
aussi l’école de la manufacture de porcelaine
de Meissen dans les années 1760 et la grande
variété de ses décors s’appuie aussi sur ses
connaissances riches et variées.
[1] Cat. exp. Rennes, 1994, n° 22, repr., Inv. 1936/141. Le dessin est annoté en haut à gauche : « D 1756 ».
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